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Rue Saint-Georges 23
Nivelles 1400
Belgique

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Blog

Nos articles de blog consacrés à des événements et des lieux liés de près ou de loin au domaine de l’art tribal africain.

Présences : photographies par Violaine Alghisi et arts premiers

Administrateur Administrateur

L’âme vibrante du Bénin

Au cœur de Nivelles, l'exposition "Présences", à laquelle nous vous convions jusqu’au 14 décembre, est une vitrine captivante qui entrelace la dynamique éclatante de l'Afrique. Pilotée par Violaine Alghisi et Awoulath Alougbin, cette exposition présente des photographies poignantes qui font le pont entre les traditions ancestrales et la modernité frénétique de l'Afrique.

Les photographies vont de portraits intimes de femmes, d'hommes et d'enfants vivant l'intensité du moment, à des images puissantes qui capturent l'esprit endurant du Bénin alors qu'il navigue à travers les marées du destin. Ces images reflètent non seulement l'esthétique visuelle du continent, mais mettent également en lumière la détermination résolue et le courage de ses peuples.

"Présences" est bien plus qu'une simple exposition d'art ; il s’agit d’une aventure à travers l'art, le patrimoine, la spiritualité, l'ingéniosité, le recyclage et la résilience. Les tirages en noir et blanc, certaines des caractéristiques les plus frappantes du projet, invitent les spectateurs à plonger plus profondément dans l'art et les histoires qu'ils encapsulent.

Violaine Alghisi, une artiste belge aux racines italiennes, apporte un mélange unique de surréalisme du Nord et de poésie latine à sa photographie. Son parcours artistique est complété par Awoulath Alougbin, dont l'expertise chorégraphique ajoute une couche riche de récit à l'expérience visuelle.

Arts et rites en Afrique de l’Ouest

Les photographies en noir et blanc seront complétées et accompagnées d'objets d'art tribal provenant de l'Afrique de l'Ouest, notamment du Bénin, du Nigeria, du Togo et de la Côte d'Ivoire. Ces pièces ont été spécialement sélectionnées par les galeristes Stéphane Loiseau et Etienne Zajega, directeurs de la galerie. Ces pièces rares offrent au visiteur une véritable fusion de matière et de perspectives.

Prévoyez votre visite à la galerie Loiseau & Zajega pour vivre cette fusion convaincante de l'art et du récit, où chaque photographie raconte une histoire de résilience, de culture et de l'esprit indomptable de l'Afrique.

Pour visiter nos espaces d’exposition, rendez-vous à la galerie sise rue Saint-Georges 23, Nivelles 1400 Belgique.

Découvrez également ci-dessous l’intégralité des tirages photographiques et objets d’art premier disponibles.

Violaine Alghisi au Bénin

Violaine Alghisi - Bénin 2024

Saami - Art et identité d'un peuple de l'Arctique

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Musée de l’Université Arctique de Norvège dans la ville de Tromsø

Culture et art des autochtones du Grand Nord européen

En cet hiver 2024 je posais mes valises dans le cercle polaire arctique, dans le comté de Troms et Finnmark en Norvège, sur l’île de Senja, territoire du peuple millénaire sami.

Une belle opportunité pour faire un crochet par le Musée universitaire de Tromsø, la plus ancienne institution académique du nord de la Norvège. Le musée fut créé en 1872, puis fut intégré à l’université de Tromø en 1976. Il est responsable de l’étude des Samis et de leur culture traditionnelle.

Entrée de l’aile dédiée à l’art et à la culture des Sâmes, Musée de Tromsø

Les Sâmes : histoire d’un peuple

Les Sâmes (aussi appelés Lapons, dénomination qu’ils rejettent) sont établis dans les parties septentrionales de la Norvège, de la Suède, de la Finlande ainsi que sur la presqu’île de Kola, en Russie ; une aire géographique d’environ 400 000 km² appelée Sápmi.
On dénombre quelques dizaines de milliers d’individus qui partagent certains traits avec d’autres peuples de l’Arctique. Les premières mentions des Samis datent de près de 2000 ans.

Les Sâmes (Samis ou encore Saamis) localisés près des côtes et dans les fjords pratiquent la pêche tandis que ceux installés à l’intérieur des terres sont semi-nomades et pratiquent l’élevage des rennes. La pêche et la chasse font cependant partie intégrante de leur mode de vie.

Histoire moderne et reconnaissance

La Norvège malgré l’adoption de sa Constitution en 1814 — ce qui en fait la plus ancienne au monde avec celles des Etats-Unis — ne reconnut officiellement qu’à partir de 1988 la culture sâme (sa langue, ses particularités, ses pratiques) avec un amendement reconnaissant aux Samis leur existence propre et leur droit de se doter une parlement dédié. Cet amendement résulta de plus d’un siècle de lutte menée par les Sâmes contre la solide politique d’assimilation menée jusqu’alors.

Dans le courant du XIXe siècle, la philosophie darwiniste conjuguée à une volonté grandissante d’indépendance des Norvégiens vis-à-vis du Danemark mena à une considération inférieure pour ce peuple finno-ougrien également considéré comme un risque sécuritaire dans la région jouxtant la Finlande et la Russie. La langue sâme fut dès lors interdite dès 1880, et ce, pendant le siècle qui suivit.
Les Samis, considérés comme des citoyens de seconde zone étaient stigmatisés, les menant à dissimuler leurs origines et par là activement éradiquer leur culture.

En 1988, le Sami Act stipule quelques mots qui pourraient s’appliquer à bien des groupes ethniques de par le monde aux cultures traditionnelles menacées par l’assimilation : “Il est de la responsabilité des autorités de l’Etat de créer les conditions permettant au peuple sâme de préserver et développer son langage, sa culture et son mode de vie.”.

Paysages enneigés du parc national de Ånderdalen

Duodji - Art premier d’Europe septentrionale

Duodji est le terme sâme désignant l'artisanat et les œuvres d'art traditionnel.
Il fait référence au processus de création d'un objet et à l'objet fini réalisé par le duojár (artisan créateur).
Les matériaux traditionnels, utilisés depuis des siècles, sont la fourrure, la peau, le bois, les racines d'arbres, la corne, les os, la laine, les perles de verre et le fil d'étain pour la confection d’une large gamme d'objets pratiques tels que des couteaux, bottes, gobelets en bois pour boire et traire, boîtes et récipients, vêtements, bijoux, skis, traineaux et berceaux. Bien qu’étant tous des objets à visée d’abord pratique, le duojár s'efforce de rendre chaque objet aussi beau que possible.

En effet, même un produit fonctionnel doit attirer l’attention. La perfection est atteinte lorsque le fonctionnalisme et la beauté sont combinés.

Le duodji a été et reste l’une des principales formes d’esthétique sâme ainsi qu’une source importante de revenus provenant des échanges et des ventes avec les Sâmes et les non-Sâmes.
Aujourd'hui, le duodji couvre un large éventail d'activités telles que l'art et l'artisanat dans une gamme de matériaux tels que le bois et l'os et l'artisanat comme le tissage et constitue la base de nombreuses petites entreprises familiales.

Le renne - Animal central dans la vie des Samis

L'élevage de rennes remonte à l'époque des Vikings. La relation des Samis avec l'élevage de rennes et l'utilisation des produits en dérivant peut être considérée comme une partie intrinsèque de la culture sâme.
Le langage des Samis est parsemé de termes associés aux rennes (et à d’autres animaux sauvages) au climat, au paysage, aux actions et aux outils. Le terme “renne” est d’ailleurs lui-même originaire du mot “reino” signifiant “jeune renne”.

Éleveur de rennes, Finnmark 1956 - Norsk folkemuseum

L'élevage de rennes a joué un rôle crucial dans l'économie des communautés sâmes nomades (réparties en groupes familiaux appelés sii’da) pendant des siècles et l'est encore aujourd'hui, soit parce qu'il s'agit du principal commerce de la communauté, soit dans le cadre d'une économie diversifiée combinée à d'autres métiers tels que l'agriculture, l'élevage, la pêche et chasse.
Le système d'élevage de rennes comprend la migration entre les pâturages d'hiver et d'été avec les troupeaux de rennes. Le ráidu ou ligne de rennes est un jouet populaire et permet aux enfants de réaliser toutes les expériences et tâches associées au travail pendant ces périodes.
Le licol de renne, essentiel dans le ráidu, est composé de nombreux matériaux différents et peut être comparé à des objets modernes similaires. Le licol documente une connaissance unique des matériaux ainsi que de la fonction et de l'utilisation des objets.

Licol décoré

Dans l'élevage intensif traditionnel du renne, les femelles étaient traites pendant l'été après la naissance des faons. Un certain nombre de produits étaient fabriqués à partir du lait, comme le fromage et le lait en poudre ou aigre, pour la vente ou pour un usage personnel.

Les femelles étaient rassemblées à des endroits fixes pendant la période allant de la Saint Jean-Baptiste (midsummer, période de festivités des pays nordiques lors du solstices d’été) jusqu'à la mi-septembre, dans des endroits calmes afin que la traite puisse se dérouler de manière simple et efficace, tant pour les animaux que pour les éleveurs.
Ces emplacements étaient de petites plaines herbeuses qui pouvaient être clôturées, dans des vallées, des montagnes ou des zones facilement confinées comme les promontoires de lacs.
Le bol à lait/cuillère ou náhppi a une forme distinctive qui assure un équilibre entre le seau et la poignée et que le lait n'éclabousse pas pendant la traite.

Traineau en forme de bateau

Niibi - Le couteau traditionnel Sami

Chez les Sami, le couteau était l’outil le plus important de tous et il était facile à porter à la ceinture.
Il existe un certain nombre de types de couteaux, grands et petits, chacun ayant des fonctions et des applications différentes.

Le couteau était utilisé pour préparer la nourriture et pour travailler avec les rennes. Il jouait également un rôle clé dans la confection des duodji (les motifs décoratifs traditionnels que l’on retrouve sur les objets du quotidien des peuples sâmes), des vêtements, des objets en cuir, et de ceux en corne.

Motifs traditionnels duodji en train d’être sculptés à l’aide d’un couteau

Un certain nombre d'autres outils étaient utilisés, notamment des hachettes, des rabots, des gouges, des perceuses, des haches, des pinces, des scies, des grattoirs et des ciseaux. Les outils modernes sont aujourd’hui utilisés aux côtés des outils traditionnels.
Le couteau devait être acheté par son nouveau propriétaire, car recevoir un couteau en cadeau pouvait être considéré comme une infraction et être restitué de manière désagréable. Si un couteau devait être donné, son propriétaire devait veiller à ce que le destinataire l'achète pour un montant symbolique.

Rabots et outils

Femmes samies travaillant cuir et tendons

Aurore boréale à Senja, phénomène autrefois interprété comme une manifestation menaçante par les Sâmes

Tambour et maillet : instruments du chaman noaidi

Le chaman, noaidi, est la figure centrale de la religion sâme. Comme dans d’autres cultures tribales de par le monde, il avait pour mission principale d’assumer la médiation entre les hommes et les puissances divines.

Le tambour, frappé de manière rythmée, permettait au chaman d’entrer en transe. Il était également couvert de motifs représentant des hommes, des animaux, divinités et éléments topographiques. Dans le cadre des rites divinatoires, l'outil principal du noaidi était un tambour goavddis, qu'il utilisait pour communiquer avec les divinités et le monde des esprits, et pour demander conseil au nom de sa communauté.

Lorsque le noaidi frappait le goavddis avec un maillet, le pointeur sur la peau du tambour s’orientait vers différents symboles, le noaidi interprétait alors ces messages selon sa compréhension ou les attentes de son public.
Le tambour était également utilisé pour initier les transes, qui permettaient aux noaidi de voyager dans l'espace et le temps, entre la Terre et le monde des esprits.

La religion traditionnelle samie est polythéiste et incorpore une multitude de dieux et d'esprits. L'un des dieux les plus importants des Sâmes est le Soleil, ou Beaivi, le père du peuple sâme et le principal symbole des goavddis.

Le maillet finement décoré en forme de T ou de Y utilisé pour frapper le tambour porte le nom de veahčir.

Dos et membranes de tambours décorés

Le yoïk (chant traditionnel) qui lui est associé et les anciens rituels ont disparu depuis longtemps. En effet, dès le XVIIe siècle, les missionnaires chrétiens s’attelèrent à éradiquer ces pratiques païennes.
En 1609, le roi dano-norvégien Christian IV décréta que ceux qui pratiquaient la « magie » seraient mis à mort sans pitié.
Dans ce cadre, tout tambour était confisqué et détruit. Il n’en subsiste aujourd’hui qu’environ 80 conservés dans toute l’Europe dont quelques uns en Norvège et un au musée de Tromsø.

En 1685, en Suède, le roi a décrété que « l'idolâtrie » devait faire l'objet d'une enquête et un processus systématique d'interrogatoire et de poursuites fut établi.

Comme dans bien d’autres contrées, l’oppression menée par les autorités liées à la Chrétienté ont poussé leurs adeptes des cultures pré-chrétienne à pratiquer leurs cultes dans le plus grand secret avant de disparaître progressivement.

Les motifs représentés sur les tambours constituent une formidable ressource pour la connaissance de l’iconographie, la culture et la religion des Sâmes. Leur interprétation nous est cependant parvenue par les écrits de missionnaires dont la mission était d’en éradiquer le cadre rituel, ce biais évident n’en facilite donc pas l’étude.

L'ancienne religion samie était une forme de chamanisme. Dans la pratique sâme, le chaman était connu sous le nom de noaidi et servait de chef spirituel et religieux de la communauté.

Maillet chamanique veahčir

Maillets chamaniques veahčir

Comme les objets d’artisanat, les costumes varient selon la région dont ils proviennent. Si l’usage de couleurs vives est omniprésent, la présence des broderies par exemple s’intensifie à mesure que l’on s’éloigne du nord de la Norvège, de la Suède et de la Finlande pour se diriger vers la région de la Lule et vers Tysfjord. Les broderies peuvent être accompagnées et perles de verre et de fil d’étain.

Gákti, le costume traditionnel des Sâmes

CC. Morten Oddvik

Coiffes traditionnelles portées par les femmes, tombées en désuétude vers le milieu du XIXe siècle

Cornes en bois conférant aux coiffes de femmes leur forme caractéristique

Les cuillères traditionnelles étaient sculptées en bois de renne. Elles revêtent une importance symbolique en plus d’être des supports d’expression artistique de choix. Elles sont encore portées aujourd’hui généralement dans un étui en cuir à la ceinture.
Un homme l’offre à la femme qu’il courtise et de même que le couteau, il s’agit d’un objet personnel porté par chaque individu.

Les Samis et leur art aujourd’hui

Art contemporain

À partir du milieu du XXe siècle, les Sâmes ont vu leurs conditions culturelles et sociales changer profondément dans les pays nordiques. Avec l’adoption de la constitution de 1988 en Norvège, puis en Suède et en Finlande. De même en Russie la pérestroïka et l’effondrement de l’Union soviétique ont favorisé les contacts entre Samis de la presqu’île de Kola et ceux des pays limitrophes.

Le mouvement culturel sâme enclenché donnera un nouveau souffle à l’artisanat traditionnel et donnera aussi naissance à des artistes au sens contemporain du terme qui relateront leur culture ancestrale au travers de supports modernes.

Nouvelle menace

Si les Samis sont aujourd’hui reconnus et valorisés, l’existence de leurs pratiques traditionnelles est à nouveau menacée au moins dans la région de Kiruna, en Suède, où l’extraction de terres rares pourrait empiéter sur leurs terres ancestrales privant le dernier peuple autochtone d’Europe du dernier passage de transhumance.

Soleil rasant de l'hiver arctique, bord de fjord

Une première pour les Arts Premiers - Fine Art Fair Wavre 2024

Administrateur Administrateur

Depuis 40 ans, la famille Defossé est investie dans l’organisation de foires internationales dédiées aux arts et antiquités en Belgique et au Luxembourg, plus précisément à Hasselt, Anvers, Luxembourg et, pour la seconde fois, à Wavre.

Forte du succès de la première édition de la Fine Art Fair en 2023 au hall de la Sucrerie à Wavre, de nouvelles galeries sont venues étoffer la diversité de l’offre parmi lesquelles la nôtre, Galerie Loiseau & Zajega, en tant qu’unique représentante des arts premiers.

En conclusion de cet évènement ayant attiré plusieurs milliers d’amateurs, collectionneurs et curieux, nous pouvons affirmer que notre sélection d’œuvres variées d’art tribal d’Afrique, d’Océanie et du Grand Nord a suscité un vif intérêt en particulier de par la cohérence de son mariage avec les œuvres de Niki Robette , artiste contemporaine pluridisciplinaire bruxelloise.

Teintes, matériaux et formes se répondaient avec une rare adéquation.
Le travail de Niki Robette se décline sur de nombreux matériaux, généralement pauvres, avec pour fil conducteur l’incrustation et le retrait de matière formant d’étonnants reliefs.
Encre de Chine, cuir, toile de lin, carton entraient en résonance avec la stylisation, les teintes et formes de statues et masques du Gabon, du Congo, du Cameroun ou encore d’objets d’art de Polynésie, de Mélanésie et d’Australie.

Herminette Nsesu Pende ; Offrande funéraire Kuba ; Couteau Musede Kota ; Monnaie Je Ndani ; Couteau Sami ; Couteau Momvu ; Peigne Yao

Cimier africain Widekum, Cameroun

Tête Kuyu Kébé Kébé

Petite visite de Pascal Duquenne sur le stand, avec Jean-Pierre Defossé

Statue Bwende, Congo Brazzaville

Encore de Chine de Niki Robette & Buste Mbo Mbete

Fétiche Bunduki Kongo Woyo - fin XIXe / début XXe siècle

Un peu de verticalité offerte par l’art océanien devant Outre-monde, Niki Robette

Préparatifs et montage du stand Loiseau & Zajega avec Niki Robette

La collection d'Art Africain du Musée Rietberg à Zürich

Administrateur Administrateur

Dans la foulée de notre visite au Museum der Kulturen Basel (MKB) en fin d’année 2023 dont nous partagions les images avec vous dans le billet de blog précédent, nous vous proposons de gravir la colline verdoyante d’Enge où se situe la villa Wesendonck, sur les hauteurs de Zürich, pour y découvrir les chefs-d'œuvre d’art tribal africain du Musée Rietberg.

Bâtie dans les années 1850, cette demeure est le siège du Museum Rietberg dont les collections d’arts premiers font partie des plus grandes et des plus notables d’Europe. On y dénombre plus de 28 000 oeuvres.

1. Statue porteuse de coupe Luba Mboko, atelier de Kabongo, avant 1939, acquis par Hans Himmelheber.
2. Masque Chokwe mwana pwo, Angola, avant 1938.

Parcours d’Afrique

La collection d'art africain du Musée Rietberg constitue un élément important de ses diverses collections, présentant une riche gamme d'objets qui couvrent les diverses cultures et traditions artistiques du continent. La collection du musée comprend des objets provenant de diverses régions, offrant un aperçu complet des expressions artistiques des différentes communautés africaines. Nous allons donc découvrir un riche ensemble de masques d’Afrique de l’Ouest, suivi de véritables chefs-d'œuvre de République démocratique du Congo et du Gabon ainsi que quelques pièces du Cameroun et du royaume Bénin.

Les masques jouent un rôle important dans de nombreuses cultures africaines, souvent utilisés dans les rituels, les cérémonies et les spectacles.
La collection du musée Rietberg comprend une gamme variée de masques, chacun ayant sa propre signification symbolique. De plus, des sculptures en bois et en bronze sont présentées, illustrant la vaste diversité des formes et des teintes des arts premiers d’Afrique.

Arts et culture Senoufo

Les Sénoufo disposent d’une société secrète appelée poro garante de l'équilibre économique et des interactions sociales dans le village. L’association poro est composée d’hommes du même âge hommes qui s’isolent, à l’abri des regards des non-initiés.
Le poro n'a lieu que lors des rituels funéraires avec des masques impressionnants ainsi qu’avec les figurines degele : les hommes initiés, le corps enveloppé dans des linges en coton frappent de manière le sol avec les degele. Selon un rituel strictement réglementé, l’arrivée du membre de l’alliance dans le « village de l’au-delà » est annoncé. Le rituel symbolise le départ de l’âme du défunt vers le monde des ancêtres.

A droite : Masque cimier serpent Baga, Guinée

Arts et cultures des complexes ethniques de Côte d’Ivoire

Dans la plupart des villages Guro, Dan et Baoulé, différents personnages masqués dansent encore aujourd'hui. Il existe deux catégories de masques : les masques liés aux cultes exclusifs et ceux liés aux divertissements qui pouvaient être vus par toute la communauté.
Les masques utilisés dans les rituels appartiennent à certaines grandes familles ou associations d'hommes. Certains d'entre eux ne sont pas autorisés à être vus par des étrangers. Ils ne sont sortis qu'en cas de décès d'un membre respecté de la famille du propriétaire ou lorsqu'une occasion importante est célébrée dans le village. Pour ce faire, les femmes et les enfants sont préalablement avertis de rester chez eux pendant les danses masquées.
Le masque traditionnel deangle des Dan présente un visage féminin à l’esthétique rayonnante. Les masques deangle se produisent dans le camp d'initiation destiné aux garçons. Ceux-ci, afin de passer à l’âge adulte, partent vivre dans un camp à l’écart du village, séparés de leurs familles.

De gauche à droite :
Masque Djimini, Côte d’Ivoire, fin XIXe - début XXe siècle
Masque Senoufo kodal, atelier de Korhogo, XIXe ou début XXe siècle
Masque Dan deangle, Libéria (Nyor Diaple), 1920’s
Masque Dan bagle, Libéria, 1900’s

Centre : Masque Gouro zamble, Côte d’Ivoire
Droite : Masque Gouro gu, Côte d’Ivoire

Gauche : Masque Gouro zuhu, Maître des Duonou, 1910-1930
Droite : Masque Gouro zuhu, Maître des Yasoua, 1920-1940

Art et culture Songye

Les figures tribales des Songye appartiennent au culte du nkishi et possèdent des pouvoirs conférés par les divinités. Les “statues de pouvoir” des Basongye sont magiquement chargées afin de prémunir leur propriétaire contre le mauvais sort et la maladie dans le cadre de rites divinatoires.
Il en existe de diverses dimensions. C’est le féticheur nganga qui accessoirise la statue pour en faire un fétiche magiquement chargé.
Dans le but de renforcer l'effet des figures nkishi, des accessoires leur sont ajoutés : on les trouve généralement au dessus du nombril où sied une cavité circulaire dans laquelle la charge est insérée.
Fréquemment, d'autres objets tels que des anneaux et clous métalliques, des miroirs, des peaux d'animaux, colliers de perles ou peau de serpent sont attachés sur la statue, en plus d’une patine souvent grasse suite à de multiples libations.

Statues Songye nkishi, R. D. Congo, 1900’s

Masques Yaka, masque Pende, et masque Songye, R. D. Congo

Statues Bena Lulua, Maître de la région de Lula, R. D. Congo, 1900’s

Repose-tête Yaka, R. D. Congo, 1850-1900

Récipients figuratifs, Zande, R. D. Congo, XIXe siècle

Harpes Mangbetu, R. D. Congo, 1850-1900

Cuillère Mangbetu, R. D. Congo, fin XIXe - début XXe siècle
Jarres figuratives Mangbetu, R. D. Congo, XIXe siècle

Diverses œuvres de République démocratique du Congo

Art et culture Fang

Les statues traditionnelles des Fang siégeaient sur des boîtes en écorce dans lesquelles les ossements des ancêtres étaient conservés. Ces « gardiens de reliquaires » étaient régulièrement oints d’huile de palme, générations après générations.
Nombre d’entre eux, tels les exemplaires présentés dans les collections du musée Rietberg, portent encore les stigmates gras de ces applications répétées.
Les villageois honoraient également leurs défunts avec des offrandes afin d’obtenir leur soutien depuis l'au-delà.
Ces rituels funéraires furent proscrits et fermement combattus par l’autorité coloniale française au Gabon, jusqu’à leur abandon par les populations locales.
Ces statues Fang appelées eyema byeri font certainement partie des objets les plus célèbres de l’art africain. Leurs jambes courtes mais puissantes, aux muscles joliment sculptés, sont caractéristiques avec des cuisses et des fesses fortement accentuées.
De nombreuses variantes stylistiques existent au sein du corpus artistique Fang selon les régions et sous-groupes de l’ethnie.

De gauche à droite :
Gardien de reliquaire Fang Betsi eyima byeri, Gabon, XIXe siècle
Gardien de reliquaire Fang eyima byeri, Guinée équatoriale, avant 1935
Tête Fang Añgokh-Nlô-Byeri, Gabon, avant 1920
Gardien de reliquaire Fang Mvai, Gabon, XIXe siècle

La question de la provenance

Le Musée Rietberg est activement engagé dans des recherches de provenance depuis 2008, un processus par lequel il examine de manière critique non seulement sa collection mais aussi sa propre histoire.

La figure fondatrice de l'institution, le collectionneur Eduard von der Heydt, a longtemps dominé l'histoire du musée et les relations possibles entre le national-socialisme et ses acquisitions d'art de l'époque.

La période 1933-1945 qui concerne aujourd'hui la collection de l'institution a déclenché les recherches de provenance du Musée Rietberg. Cependant, d’autres histoires sur la collection ont émergé, liées au commerce mondial de l’art, à la violence du colonialisme et aux relations de pouvoir inégales.

Statues et maternités de R. D. Congo et de République du Congo

Aujourd'hui, la recherche de provenances au Musée Rietberg se concentre largement sur les contextes d'acquisition dans les pays d'origine, sur la reconstitution des collections sources, sur le marché de l'art et sur les biographies des personnes impliquées dans tous les aspects du passé d'un objet.

Les œuvres d'art et les histoires sur leurs origines ne sont que le point de départ d'un examen approfondi, d'autant plus important que pratiquement aucune d'entre elles n'a été créée pour être exposée dans un musée. Une partie importante du spectacle est la reconstitution des chemins individuels qu'ils ont suivis pour y arriver.

Siège de chef Hemba, R. D. Congo, XIXe-XXe siècle

Statue de maternité Kongo Yombé phemba, , R. D. Congo, XIXe siècle

Centre : Statue masculine, Maître de la région Bwende, Congo Brazzaville, XIXe siècle

Statue de maternité Yombé phemba, Maître de Boma-Vonde, R. D. Congo, mi-XIXe siècle

Gauche : Statue Bembé avec charge magique sur le dos, Congo Brazzaville, début XXe siècle
Droite : Statue Bembé, Congo Brazzaville, XIX siècle

Vue latérale permettant de découvrir une imposante charge magique.

Coupes figuratives Kuba, R. D. Congo, XIXe siècle

Statue d’ancêtre Kasingo, R. D. Congo ou Tanzanie, XIXe siècle

Statue d’autel funéraire Kongo Yombé bitumba, R. D. Congo ou Congo Brazzaville

Musée des Cultures de Bâle - Les arts premiers en Suisse

Administrateur Administrateur

Collections d’ethnographie du MKB

En ce début d’année 2024, nous partageons avec vous notre visite au Musée des Cultures de Bâle (Museum der Kulturen Basel), en Suisse, à deux pas de la frontière française.

Situé en bordure de Rhin, le MKB possède l’une des plus grandes collections d’objets ethnologiques d’Europe. On y dénombre, entre autres, une grande quantité de pièces d’arts premiers d’Afrique, d’Océanie, de Papouasie-Nouvelle-Guinée et d’Amérique précolombienne.

Les espaces d’exposition s’empilent sur quatre étages, chacun présentant un ensemble d’œuvres autour d’un thème spécifique intégrées dans une scénographie lumineuse et aérée.

La Münsterplatz à Bâle où se situe l’entrée du Musée des Cultures

Entrée du Museum der Kulturen (MKB), désert le 25 décembre 2023

LA NUIT - RÊVER OU VEILLER
Exposition temporaire

L’exposition temporaire du premier étage rassemblait des pièces des quatre coins du monde autour d’un thème partagé par l’ensemble de l’humanité : le sommeil.

Objets utilitaires de choix, les lits et appuie-nuques ont été des supports artistiques pour les sculpteurs traditionnels en Afrique mais aussi en Asie et en Océanie.

Objets du quotidien fort appréciés dans de nombreuses cultures, les repose-têtes ou appuie-nuques servent à se reposer ou à dormir. Souvent, on choisit une position couchée latérale. On s’en sert notamment pour protéger les coiffures raffinées.

Ci-dessus : Appuie-nuque | Wodole, Libéria | vers 1950 | bois, métal | collection Hans Himmelheber

Appuie-nuque Turkana | Marsabit, Kenya | avant 1980 | bois, fibres végétales | Marianne Fiechter

Les lits ne servent pas seulement à dormir. Dans les îles de l’Amirauté (Papouasie-Nouvelle-Guinée), ils jouent également un rôle important lors des mariages et des enterrements.

On ne sait pas si ce lit est destiné à dormir ou si c’est un lit à usage cérémoniel. Il provient de l’île de Bipi, l’un des derniers centres de production de lits des îles de l’Amirauté.

Ci dessus : Lit kiau | Bipi, îles de l’Amirauté, Papouasie-Nouvelle-Guinée | avant 1930 | bois, pigments | Alfred Bühler

Repose-tête | Golfe occidental de Papouasie, Papouasie-Nouvelle-Guinée | avant 1931 | bois | Paul Wirz

Appuie-nuque makura koro | Japon | 1e moitié du XIXe s. | bois, laque urushi, nacre, poudre d’or, métal | Hans Spörry

Lit d’enfant portable | Sapporo, Hokkaido, Japon | non daté | bois, bambou, écorce, textile, jonc, colorant | W. Koller

Centre : Chasse-mouche | Magendo, Sepik inférieur, Papouasie-Nouvelle-Guinée | avant 1930 | plumes de casoar, rotin, ficelle, tissu | Felix Speiser

Droite : Chasse-mouche | Ayoreo | El Faro Moro, Chaco, Paraguay | 1970 | fibre de caraguata, bois | collection Verena et Walter Regehr-Gerber

Appuie-nuque | M’bunai, Manus, îles de l’Amirauté, Papouasie-Nouvelle-Guinée | avant 1930 | bois, pigments | Alfred Bühler

VIVANT - BIEN PLUS QUE DES MONDES HUMAINS
Exposition permanente

La collection permanente “Vivant” dresse un pont entre les cultures au travers de leurs objets d’art tribal et le thème de la crise écologique. Les cultures traditionnelles sont, tout comme l’environnement, menacées par la globalisation et d’exploitation incessante des ressources.

Art du Haut-Sepik

Par le passé, les habitants du Haut-Sepik utilisaient ce type de boucliers de guerre pour se défendre. Il est à nouveau question de défense aujourd'hui: depuis les années 1960, on planifie dans cette région des projets de grande envergure pour extraire de l'or et du cuivre.
En outre, la construction d'un barrage est envisagée. La population indigène, quant à elle, défend le fleuve en sa qualité d'être vivant.

Pour nous ... les humains qui appartenons au fleuve ... celui-ci est un esprit vivant.
Nous avons des langues et nous avons des chants et des histoires qui disent ... qu’il peut se réveiller et parler avec toi. Et il dort. Il rêve. ... et toutes ses formes de vie, tant les plantes que les animaux, sont ainsi liées à nous. Et c’est vraiment important.
— Manu Peni, 2020

La kesa incarne une reine, une gardienne de la terre et de l'eau. À Buka, dans la région de Bougainville, la population indigène est parvenue, grâce à des manifestations, à faire fermer une mine de cuivre qui cause des dommages considérables depuis les années 1970, et continue de nuire à la vie jusqu'à nos jours.
Cette résistance contre le gouvernement de Papouasie-Nouvelle-Guinée a permis au Bougainville d'obtenir le statut de région autonome.
Dans ce combat, les femmes ont joué un rôle décisif.

Ci-dessus :

  • Sculpture d'une reine kesa | Groupes Naka et Naboin, Buka, Bougainville, Îles Salomon | avant 1930 | bois, fibres végétales, plumes, peinture | Felix Speiser

  • Boucliers inaune | Paupe, Sepik, Papouasie-Nouvelle-Guinée | avant 1966 | bois, peinture | collection Giesela et Meinhard Schuster

Arts d’Afrique

De petits tambours à fente jouent un rôle essentiel dans les pratiques des Yaka en République démocratique du Congo : l’on se rend chez des spécialistes rituels pour guérir de maladies, élucider les causes de mésaventures ou solliciter un conseil spirituel.
Au moyen de ces tambours, ces derniers établissent un lien entre vivants et ancêtres. Un état de conscience avancé, des gestes rituels et des coups précis sur le tambour à fente leur permettent de canaliser les forces et les messages des ancêtres.

Gauche : Tambour à fente de divination n'koku ngoombu | Angola ou République démocratique du Congo | avant 1933 | bois, laiton | Jean Roux, don 1933

Droite : Tambour à fente de divination n'koku ngoombu | République démocratique du Congo | avant 1933 | bois, métal, laiton, fibres végétales | achat d'un inconnu 1933

MEMORY - MOMENTS DE SOUVENIR ET DE L’OUBLI
Exposition temporaire

Cet espace présente au visiteur des œuvres et objets, non seulement d’art tribal extra-européen mais aussi d’Europe, liés au culte des ancêtres, à la transmission, au souvenir.

Droits et rituels

De nos jours, les sculptures malagan sont utilisées lors d’événements importants en Nouvelle-Irlande (Papouasie-Nouvelle-Guinée), à fréquence irrégulière. Les cérémonies malagan sont célébrées à la mémoire de personnes défuntes. Mais à ces occasions, on règle aussi les questions de culpabilité et les litiges.
Les sculptures sont considérées comme des souvenirs visuels des défunts, mais pas dans le sens de portraits. Dans ce contexte, la mémoire n’est pas liée à la possession des sculptures en tant que telles, mais à la possession de certains droits sur des motifs et rituels malagan.
Après leur utilisation lors de cérémonies, les sculptures malagan étaient laissées à l’abandon, brûlées ou vendues à des collectionneurs et des musées.

Dans le cadre de cette conservation – non prévue –, les sculptures prennent un nouveau sens.

Dángala malagan ; Lamusmus, Nouvelle-Irlande, Papouasie-Nouvelle-Guinée ; avant 1931 ; bois, pigments, fibres végétales, coquilles d’escargots ; coll. Alfred Bühler 1932

Malagan ; Beilifu, Nouvelle-Irlande, Papouasie-Nouvelle-Guinée ; avant 1931 ; bois, pigments, cire, fibres végétales, coquilles d’escargots ; coll. Alfred Bühler 1932

Malagan ; Panafau, Nouvelle-Irlande, Papouasie-Nouvelle-Guinée ; avant 1931 ; bois, pigments ; coll. Alfred Bühler 1932

Trois masques d’ancêtres ; Guarani ; San Antonio de Parapeti, Santa Cruz, Bolivie ; 1964; bois, pigments de couleurs; coll. Borys Malkin, achat 1966

Culte des ancêtres controversé

Les masques mai font partie intégrante de la danse éponyme, telle que la pratique le peuple Iatmul, sur la rivière Sepik, en Papouasie-Nouvelle-Guinée.
La fabrication des masques et des costumes traditionnels ainsi que l’harmonisation des masques dans la maison de culte, l’entrée en scène des danseurs et l’acte rituel lui-même suivaient autrefois des règles strictes. C’était la seule manière de garantir le contact avec les ancêtres.
De nos jours, la danse n’est que rarement pratiquée. Pour faire revivre la danse, des groupes urbains iatmul s’appuient sur des enregistrements vidéo des années 1970 : ils courent toutefois le risque d’irriter les ancêtres par une représentation modifiée, donc incorrecte.
Les Iatmul se demandent comment les ancêtres apprécient le monde moderne; ils débattent pour savoir s’il est plus important de conserver le lien avec les ancêtres ou s’il serait préférable de s’abstenir de danser en raison de leur manque de connaissances.
Non seulement cela montre à quel point le souvenir façonne le présent, mais cela renvoie aussi au pouvoir que revêt l’acte de la documentation et à la responsabilité qu’entraîne l’utilisation d’enregistrements historiques.

Deux Masques mai ; Nyaurangei, Moyen Sepik, Papouasie-Nouvelle-Guinée ; avant 1959 ; bois, coquilles de nasse (Nassariidae), coquilles cauri (Cypraeidae), coquilles d’escargots marins (Conidae), terre glaise, cheveux humains, défenses de sanglier, touffe de fibres ; coll. Alfred Bühler 1959

Centre : Masque mai ; Yensemangwa, Moyen Sepik, Papouasie-Nouvelle-Guinée; avant 1959 ; bois, pigments, défenses de sanglier, coquilles cauri (Cypraeidae), coquilles d’escargots marins (Conidae) ; coll. Alfred Bühler 1959, Vb 25355

Deux Masques mai ; Moyen Sepik, Papouasie-Nouvelle-Guinée ; avant 1972 ; bois, pigments, défenses de sanglier, coquilles de nasse (Nassariidae), coquilles cauri (Cypraeidae), coquilles d’escargots marins (Conidae), fibres végétales, cheveux humains, résine; coll. Jürg Schmid, Florence Weiss, Milan Stanek, Markus Schindlbeck, expédition 1972-74

Des ancêtres puissants

Les ancêtres (adu) revêtent une importance particulière pour les habitants de l’île de Nias, en Indonésie. Avant l’adoption de la foi chrétienne, les ancêtres – hommes et femmes – étaient des êtres puissants, à l’influence décisive sur la vie des êtres humains.
Sculptées dans le bois, les statuettes d’ancêtres adu zatua avaient une place établie dans chaque maison. C’étaient des réceptacles pour les défunts, que l’on traitait avec respect afin de s’assurer leur bonne volonté et leur protection.
Avec la christianisation, de nombreuses statuettes d’ancêtres disparurent de la vie quotidienne et se retrouvèrent dans des musées. Mais les ancêtres continuent à vivre sur l’île de Nias à travers la tradition orale et on continue à réciter, sous la forme de chants, des généalogies remontant loin dans le passé.

Cinq statuettes d’ancêtre adu zatua (féminines) ; centre de Nias, Indonésie ; début du XXe s. ; bois, textile ; coll. Paul Wirz 1925

Quatre statuettes d’ancêtre adu zatua (masculines) ; centre de Nias, Indonésie ; début du XXe s. ; bois, textile ; coll. Paul Wirz 1925

Ancêtres protecteurs

Presque toute l’île de Bornéo connaît les statuettes en bois aux traits humains. En règle générale, les statues d’ancêtres, placées aux abords des maisons communautaires, représentent des ancêtres récemment décédés. Ils peuvent revêtir des traits humains individualisés.
Expression personnelle de la mémoire du défunt, ces sculptures offrent un foyer temporaire à leurs âmes. Les sculptures d’ancêtres ornées tiennent aussi les maladies à distance. Les statues érigées à l’entrée des villages, près des champs ou des tombes sont censées éloigner les puissants esprits maléfiques. Leur expression faciale agressive et leurs proportions imposantes sont autant de moyens de dissuasion efficaces.

Gauche << : Statue d’ancêtre hampatong ; sans doute Siang, cours supérieur du Barito, centre de Bornéo, Indonésie ; XIXe s. ou début du XXe s. ; sans doute bois de fer ; coll. Paul Wirz 1926

Gauche < : Statue d’ancêtre hampatong ; sans doute Ngaju, centre de Bornéo, Indonésie ; XXe s. ; bois ; coll. Anne Morley 1987

Ancêtres présents

Alfred Bühler acheta ces statuettes en 1935 à Baguia, au Timor-Leste (Timor oriental). Hélas, il ne documenta pas les circonstances exactes de son acquisition.
Sur ses photographies, cependant, on peut voir de telles statuettes sur des tombes. À cette époque, les tombes des défunts étaient disposées dans le village, autour des maisons. On assurait ainsi la présence et la proximité des ancêtres, qui devaient apporter protection et bien-être.
Les statues en bois gardaient vivant le souvenir des défunts et rappelaient qu’ils continuaient à exercer leur influence dans l’ici et maintenant. Autrement dit, ils exhortaient les vivants: “Ne nous oubliez pas!”

Couple d’ancêtres, personnage féminin atewaa tufu, personnage masculin atewaa namie ; Makasae ; Baguia, Timor-Leste ; XIXe s. ou début du XXe s. ; bois; coll. Alfred Bühler 1935

Le Rêve des Aborigènes d’Australie - Ecorces peintes

Le temps du Rêve est une époque où certaines créatures, comme le serpent Jurlungur, créèrent les éléments importants pour l’être humain ; les paysages, plantes et animaux, l’ordre social, les cérémonies, les chants et les mythes.
Le temps du Rêve ne se réfère pas seulement au passé, mais s’applique aussi au présent et à l’avenir.
Lors des cérémonies et des rituels, le lien avec le temps du rêve est maintenu et actualisé.
Les peintures sur écorce (bark paintings) représentant des motifs de cette époque constituent une caractéristique particulière de la région de la Terre d’Arnhem et un support relativement nouveau pour soutenir la mémoire des histoires transmises oralement.
L’ethnologue et artiste Karel Kupka, qui a collecté des objets pour le musée, a été l’un des premiers à reconnaître et documenter l’expression artistique individuelle.

Peinture sur écorce; Yilkarri Katani ; Milingimbi, Australie; avant 1957 ; écorce, pigments, eucalyptus (Eucalyptus) ; coll. Karel Kupka 1957

Peinture sur écorce; Dawarangulili et Dawidi; Milingimbi, Australie; avant 1957 ; écorce, pigments, eucalyptus (Eucalyptus) ; coll. Karel Kupka 1957

Peinture sur écorce; Mawalan; Milingimbi, Australie; avant 1957 ; écorce, pigments, eucalyptus (Eucalyptus) ; coll. Karel Kupka 1957

Dynasties régnantes

Noter les dynasties régnantes et les anniversaires occupe une place importante dans l’histoire des Mayas. Le linteau de Tikal (Guatemala) est un document central pour comprendre l’histoire, la société et la cosmologie des Mayas. Il commémore le souverain maya sans doute le plus puissant de son époque : Yik’in Chan K’awiil, le 27e souverain divin de la dynastie de Tikal.
Le linteau le représente en 746, à l’occasion de la commémoration de sa victoire sur le village de Yaxá, trois ans plus tôt. On le voit sur un palanquin. Le palanquin avec la divinité protectrice de la ville de Yaxa’ est un butin de guerre de Tikal.
Le déchiffrement de l’écriture maya a fait de grands progrès au cours des dernières décennies : le texte accompagnant décrit la fête commémorative représentée de Yik’in Chan K’awiil et légitime son règne en le replaçant dans la lignée de sa dynastie.
C’est le Bâlois Carl Gustav Bernoulli qui ramena ce linteau en Suisse, en 1878. Dans sa correspondance avec d’autres explorateurs, il mentionne l’avoir retiré du temple et emmené avec la permission des autorités guatémaltèques.

Linteau, temple IV Tikal ; Maya ; Tikal, Guatemala ; 746/747 ; bois de sapotier (Achras zapota L.), pigments de couleurs ; coll. Carl Gustav Bernoulli 1878

Données saisies

Dans l’empire inca (vers 1400-1532) et au début de l’époque coloniale (XVIe siècle) au Pérou, les données comptables, statistiques et stratégiques ainsi que la mémoire d’événements historiques étaient transmises, dans l’espace andin, par des cordons noués (khipu en quechua).
Fondés sur un système décimal, les khipu numériques servaient à sauvegarder les informations relatives aux ventes et distributions de nourriture, aux paiements de tributs, aux statistiques de la population ou à la taille des troupeaux.
Un khipu se composait d’une corde principale et de cordelettes secondaires ayant à intervalles fixes, des nœuds pour les unités, les dizaines et les centaines. Le nombre de boucles d’un nœud indiquait le nombre par lequel il fallait le multiplier. Ainsi, un nœud à trois boucles au chiffre des dizaines (3 x 10) correspondait au chiffre 30.
À partir du XVIe siècle, la signification de la torsion, de la coloration et des matériaux utilisés tomba dans l’oubli, l’administration coloniale espagnole ayant interdit l’utilisation des khipu.
Des chercheurs du Harvard Khipu Database Project se penchent dessus actuellement. Dans le cadre de leur travail au Museum der Kulturen Basel, ils ont redécouvert l’un des plus grands montages de khipu, dont la dernière étude scientifique remonte à 90 ans.

Montage de 10 khipu de numérisation et de cordelettes isolées ; Pérou ; 1400-1530 ; coton, retors ; sans doute issu de la coll. Eduard Gaffron

Histoire gravée

Les Kanak faisaient de multiples usages des bambous pourvus de (pyro-)gravures : ils s’en servaient comme flûtes, récipients, instruments à percussion et comme objets les protégeant du malheur lors de voyages.
Les dessins incisés représentent des événements historiques de la vie quotidienne de la population de Nouvelle-Calédonie, ainsi que des scènes de rencontres et d’affrontements avec les colonisateurs français. Les Kanak ont subi non seulement l’invasion coloniale, mais aussi l’introduction de maladies, dont beaucoup sont morts. La puissance coloniale française répondit à leurs soulèvements par des expéditions punitives ou des déportations.

Cathédrale de Bâle, sur la Mûnsterplatz

Dan & Co - Les monotypes de Pascal Duquenne mariés aux masques Dan d'Afrique

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Art extra-européen & Art contemporain à Nivelles

Marier les arts extra-européen et contemporain. Si l’idée n’est pas tout à fait neuve, sa pertinence a une nouvelle fois convaincu le public au travers de notre exposition Dan & Co présentant une sélection diversifiée de masques africains des Dan, des Kran, des Wé, des Guéré et d’autres groupes apparentés, dialoguant avec les monotypes de Pascal Duquenne et les œuvres de Niki Robette, tous deux artistes belges.

Grands classiques des arts d’Afrique de l’Ouest, de Côte d’Ivoire en particulier, les masques traditionnels des Dan séduisent par leurs courbes élégantes, surprennent aussi par leurs accessoires, patines et expressions exubérantes parfois.

Pascal Duquenne : la figure humaine dans l’art brut

Nous avons ainsi présenté dans notre galerie située au cœur de Nivelles (Brabant Wallon) une trentaine de pièces provenant de diverses collections européennes, africaine et américaines.
À ces visages répondaient dans notre bright room les œuvres du comédien et artiste Pascal Duquenne, connu au premier abord pour son rôle dans le film “Le huitième jour”. Les talents du personnage ne se limitent ainsi pas à ceux d’acteur. Pascal Duquenne, parallèlement à sa carrière de comédien, s’exprime sur papier au sein du CRÉAHM depuis les années 1980.

Comédien, couronné d’un Prix d’interprétation masculine à Cannes, une palme partagée avec Daniel Auteuil, Pascal Duquenne centre son travail sur la figure humaine, souvent féminine.
Adepte de la technique du monotype, ses portraits en noir et blanc accentuent l’épure des visages.
Base large, lèvres noires, yeux peints, fronts hauts, ceux-ci dégagent, au-delà de la rigueur de la forme, une sensualité qui invite.
Dans ces œuvres sobres, parfois rehaussées d’une couleur au pastel, le cadrage est l’élément dynamique essentiel de la composition. Décentrées ou alignées, les silhouettes portent toutes leur regard vers l’extérieur.
Pascal Duquenne est un artiste de l’attention.”

Le CRÉAHM est un laboratoire d’expérimentation artistique proposant des ateliers d’arts plastiques et d’arts vivants à des personnes en situation de handicap mental.

Pascal Duquenne lors du vernissage de l’exposition Dan & Co à la galerie Loiseau & Zajega, Nivelles

Pascal Duquenne démontre au visiteur toute sa maîtrise à la fois de la figure humaine et de la technique du monotype. Visages et corps se succèdent dans un ballet de blanc et de noir parsemé de stries et de motifs unanimement salué par les amateurs d’art contemporain tout autant que par les curieux et les collectionneurs d’art africain.

Niki Robette : abstraction et polyvalence

Au sous-sol, notre dark room accueillait quant à elle les œuvres de Niki Robette, artiste plasticienne bruxelloise.
Ses influences, puisées chez les grands maitres, (Brancusi, Motherwell, Soulage, Kline, Hyong-Keun, Kiefer, Tapies,...) aux formes pleines et sensuelles, l'amènent à rechercher la simplicité, l'épure, et le langage le plus dépouillé possible. La tendance moderniste se ressent dans son travail de courbes, d'asymétrie, de lignes, de formes brutes ou organiques, et la trame, qui est au centre de ses recherches.
L'abstraction brute anime ses principaux travaux, dans le but d'interroger le rapport de l'homme au temps et au sens, et laisser l'interprétation la plus libre à chacun, afin de trouver un écho à notre propre monde intérieur.
Sa réflexion s'articule sans répit, autour d'une dialectique oscillant entre création et destruction.

L'artiste n'a de cesse d'explorer de nouveaux matériaux, en privilégiant la récupération, et jouant avec les traces du temps sur le bois, le cuir, le carton, le plâtre, etc... La nature, dans ses variantes infinies, est au cœur de sa recherche, et interroge notre manière d'habiter ce monde, en perpétuelle mutation.

De quoi conférer peut-être un nouveau souffle à l’image parfois poussiéreuse des galeries d’arts premiers et démocratiser l’accès à ces objets traditionnels que certains pensent réservés aux collectionneurs.

Les arts premiers à Nivelles en janvier 2024

L’exposition Dan & Co - Art extra-européen et monotypes de Pascal Duquenne pouvait être visitée à la galerie Loiseau & Zajega, rue Saint-Georges 23, Nivelles 1400, jusqu’au 18 janvier 2024.

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Exposition Dan & Co dans les médias

Nous avons eu l’opportunité de présenter l’exposition et la galerie Loiseau & Zajega sur les ondes d’Antipode, la radio officielle de la province du Brabant Wallon, aussi diffusée au sud de Bruxelles.

Retrouvez également un article sur le site de La Libre.

La Libre Exposition Galerie Loiseau & Zajega

Musée de Boulogne-sur-Mer - Art d'Océanie et d'Amérique du Nord

Administrateur Administrateur

Si les grands musées dédiés aux arts premiers sont connus de toutes et tous, collectionneurs ou non, parmi lesquels le Musée Royal de l’Afrique Centrale auquel nous avons déjà consacré un article ici et un autre là, le Musée du quai Branly, et bien d’autres grandes institutions situées de par le monde, il n’en va pas nécessairement de même en ce qui concerne les structures plus provinciales.

Ainsi, je vous propose de découvrir ici les remarquables collections d’art tribal d’Océanie et d’Amérique du Nord présentées au Musée de Boulogne-sur-Mer.

Des pièces exceptionnelles y sont exposées allant des masques très graphiques des Inuit jusqu’au chefs-d’œuvre de raffinement provenant des îles du Pacifique. Le musée ravira aussi les amateurs de tableaux de maîtres célèbres, d’archéologie égyptienne et grecque.

Vous reconnaîtrez ci-dessous des pièces bien connues, maintes fois publiées. Les rencontrer “en personne” relève cependant d’une expérience bien différente, c’est pourquoi je ne peux que vous inciter à faire le déplacement à Boulogne-sur-Mer pour observer en détails et sous tous les angles ces œuvres intemporelles et vous imprégner de leur puissance.

Le département d’ethnographie extra-européenne

La richesse exceptionnelle du département d'ethnographie extra-européenne inclut une collection d'objets d'Alaska qui rassemble un ensemble unique au monde de masques cérémoniels sugpiat de l'île Kodiak ramené par le boulonnais Alphonse Pinart en 1872.

Une des collections d'art tribal d'Océanie les plus importantes du nord de la France est également conservée au Musée de Boulogne-sur-mer.

Masque Koniag, île Kodiak, Alaska

Cet masque est publié sur la couverture de l’ouvrage L’art du Grand Nord, Citadelles & Mazenod, 2001

Peuples de l’Arctique

La culture Sugpiaq

La culture Sugpiaq était une société de chasseurs de mammifères marins. Elle s'étendait sur la zone continentale du détroit de Prince William, la péninsule du Kenai, la péninsule alaskienne et l'archipel de Kodiak, en Alaska.

Les masques, nommés ginaqua (ce qui signifie «comme un visage, mais pas vraiment») étaient des objets emblématiques de cette culture. Ils étaient utilisés l'hiver, lors de festivités destinées à favoriser la saison de chasse suivante.
Les danses masquées étaient des moments importants de partage de croyances, de préservation de l'équilibre des forces qui régulaient la vie quotidienne.

Ensemble de masques Sugpiaq, île Kodiak, Alaska

D'en haut à gauche vers en bas à droite :

1. Angun / Vieil homme

2. Nallumalik / Celui qui ne sait pas

3. Nom illisible

4. Asghigik / Celui qui de la chance

5. Ingillagayak / Celui qui annonce le temps

6. Yuaulik / Chercheur

7. Payulik / Celui qui apporte la nourriture

8. Unartuliq / Protecteur

9. Unnuyayuk / Voyageur de nuit

10. Agu'lik / Large masque

Cependant, les Russes conquièrent l'ensemble de l'Alaska en 1784.
Développant le commerce des fourrures, ils forcèrent les Sugpiat à travailler dans leurs compagnies et les contraignirent violemment à la chasse et à la pêche en eaux lointaines. Cette domination brutale fit suite à d'importants massacres. Additionnée à de dramatiques épidémies, elle causa la perte de la majeure partie de la population Sugpiaq, ainsi que des croyances, pratiques et productions matérielles essentielles à cette culture. Une société métissée vit alors le jour, les Russes épousant des femmes autochtones. Les croyances sugpiat se fondirent progressivement dans le christianisme orthodoxe russe.

Alphonse Pinart arriva à Kodiak à un moment clé. En effet, les Russes se retiraient peu à peu et les Américains, qui leur avaient acheté l'Alaska cinq ans plus tôt, n'étaient pas encore totalement implantés. En 1871, il devait donc être plus facile d'observer les coutumes sugpiat et de collecter des masques et objets.

Les Sugpiat eurent ensuite à survivre à l'acculturation imposée par le gouvernement américain (interdiction de parler la langue autochtone), au dramatique tremblement de terre de 1964 qui détruisit une grande partie des villages de l'archipel de Kodiak, puis à la marée noire dévastatrice de l'Exxon Valdez en 1989. Malgré cette difficile histoire, le souvenir de certaines pratiques sugpiat a perduré au sein des commu-nautés. Aujourd'hui, des associations et des groupes d'artistes font revivre la tradition des masques et des danses qu'ils accompagnent.

 

Masque Kugukauk / Le préféré, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak, Alaska

Masque, nom inconnu, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak, Alaska

Masque, Nakllegnaq / Le pitoyable, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque Shugashat (féminin), culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque Igyuyrtulik / Chercheur, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque Allayak / Différent (féminin), culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Nayurta / Le veilleur, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Lurtusqaq / Celui qui est large, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Giinasinaq / Grand visage, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Masque cérémoniel Qarua’at’stun Elnguq / Comme un corbeau, culture Sugpiaq, archipel de Kodiak

Modèle réduit de kayak, culture Unangax, îles Aléoutiennes (Unalaska), XIXe siècle

Sur ce kayak miniaturisé, le personnage est en train de projeter une lance employée pour la chasse à la loutre, à l’aide d’un propulseur.
Sa parka en intestin animal lui permet de rester au sec et assure l’étanchéité de son embarcation en étant fixée au rebord de la place.

La culture Yup’ik


Les Yupiit vivent sur la côte Sud-ouest de l'Alaska, dans la région du Yukon-Kuskokwim, la baie de Bristol et l'ile de Nunivak.

Avant les colonisations, les Yupiit étaient une culture semi-nomade. Pendant le printemps et l'été, les familles se dispersaient dans des camps de pêche et de chasse au gré des déplacements du gibier, mais retournaient dans le village permanent pendant l'hiver.
Ces villages pouvaient regrouper jusqu'à 300 personnes. Les hommes vivaient ensemble dans la maison des hommes (gasgiq) et les femmes et les enfants vivaient par groupe dans des maisons semi-souterraines plus petites.

Lunettes à neige, culture Yup’ik, Saint-Michel, Baie de Norton, Alaska, XIXe siècle

Pendant l'hiver, la gasgiq était le centre de la communauté où se déroulaient les cérémonies traditionnelles telles que le Bladder festival (festival de la vessie).
Dans les croyances Yupiit, le cycle de la vie ne s'interrompt jamais et l'esprit de tout être vivant se réincarne après la mort. Ainsi, l'esprit des animaux chassés doit être traité avec attention pour permettre cette réincarnation.
Le phoque qui reconnaît les mérites d'un chasseur va l'autoriser à le tuer. Son esprit se transporte alors dans sa vessie, ainsi lorsque son corps meurt pour offrir de la nourriture au chasseur, son esprit reste vivant dans la vessie jusqu'à ce qu'il retourne dans la mer.
Le Bladder festival est donc une célébration du cycle de la vie. Le chasseur Yup'ik collecte les vessies des phoques tués pendant la saison et à la fin des célébrations les remet à l'eau pour permettre aux esprits des phoques de renaître pour la saison suivante.

Les contacts des Yupiit avec le monde extérieur ont été plus tardifs que pour les autres cultures d'Alaska. Ceci leur a permis de conserver d'avantage leur style de vie et leurs coutumes.
La langue traditionnelle est toujours parlée et leurs traditions encore connues actuellement. L'étude de la culture Yupik a notamment permis à la culture Sugpiaq très proche de combler des lacunes dans la connaissance de ses propres traditions.

 

Support de pagaie en forme de nageoire de morse, culture Yup’ik, île de Nunivak, Alaska, XIXe siècle

Ci-dessus, un masque “Jenna Class”, culture Kaigani Haida, Côte Sud-Est de l’Alaska composé de bois, verre et tendon. Il date du début du XIXe siècle.

Collecté dans un contexte différent du reste des objets alaskiens du musée, ce masque représentant un visage paré d'un labret (ornement de lèvres) appartient à la culture Kaigani Haida (côte Nord-Ouest des Etats-Unis).
Rapporté par le Vice Amiral de Rosamel qui l'offre au musée de Boulogne en 1838, il est le premier objet alaskien à entrer dans les collections.

Ce masque représente un visage féminin. En effet, dans les cultures Haida, Tlingit et Tsimshian, au moment de l'adolescence, les jeunes filles avaient la lèvre inférieure percée afin d'y insérer un ornement dont la taille devenait de plus en plus importante chaque année. Le port de labret dans la lèvre inférieure était donc réservé aux femmes.

Ce type de masque représentant une femme parée d'un labret est connu dans les cérémonies Haida, cependant celui-ci semble faire partie des objets réalisés dans le but de les offrir en cadeau aux marins européens de passage dans les villages.
En effet, on connaît une douzaine de ces masques sculptés par un même artiste dans les années 1820 à cet effet. Bien que ces masques n'aient pas été portés, ils reprennent les formes et symboles propres aux objets traditionnels.

Le nom de « Jenna Cass », associé à ces masques en raison d'une annotation sur l'un d'entre eux, proviendrait du mot « Djiláqons », désignant une figure féminine récurrente de la mythologie Haida, mère de tous les aigles.

Visière de chasseur elqiaq, culture Yup’ik, Saint-Michel, Baie de Norton, Alaska, XIXe siècle

Parcours des mondes : escale dans les lagons et îles volcaniques

Le plaisir des yeux ne s’arrête pas là. Une fois repu des trésors d’art traditionnel arctique, d’autres salles nous emmènent dans les mers du Sud à la découverte des joyaux d’art océanien.

D’île en île, nous découvrons la richesse, la finesse et la diversité des artistes insulaires de Polynésie, de Nouvelle-Zélande, de Nouvelle-Calédonie, des îles Carolines et bien d’autres encore.

Modèle réduit de pirogue de guerre, culture Maori, Nouvelle-Zélande, XIXe siècle

Le chef-d'œuvre sculptural ci-dessus, un modèle réduit de pirogue de guerre, fut collecté par Dumont d'Urville sur le navire l'Astrolabe en 1827.
Il l'aurait acquise auprès d'un chef de la baie de Tolaga en Nouvelle-Zélande.

Les pirogues de guerre Waka Taua étaient la fierté des groupes. Elles pouvaient mesurer de 18 à 21 m de long et porter une centaine de guerriers.

La poupe Taurapa se présente sous la forme d'une frise verticale de bois ajourée, dans laquelle une figure de manaia (esprit protecteur) tient deux bandeaux parallèles.

Sur la proue, une figure agressive tirant la langue peut être interprétée comme Tumatauenga, dieu des hommes et de la guerre.
Derrière cette figure, les motifs de spirales encadrant un personnage de face sont souvent compris comme une référence au mythe de la création du monde maori, qui rapporte que la lumière (les spirales) fut introduite dans le monde grâce à la séparation de la mère-terre, Papa, et du père-ciel, Rangi, par leur fils Tane (dieu des forêts).

Ce type de modèle pouvait avoir un usage rituel, et certains furent utilisés comme cadeaux prestigieux aux européens.

La navigation guerrière

Dans de nombreuses régions d'Océanie, les populations entretenaient entre elles des relations d'opposition et l'état de guerre y était parfois une situation endémique.

Les motivations des attaques pouvaient être très diverses : luttes pour le territoire et luttes de pouvoir, vengeance de la mort de l'un des membres du groupe attribuée à la sorcellerie d'un groupe voisin, raisons religieuses et rituelles.

Souvent, les attaques privilégiaient la voie maritime ou fluviale (les affrontements navals semblent toutefois avoir été extrêmement rares) ; les guerriers parés et armés prenaient alors place dans de grandes pirogues de guerre dont on trouve des exemples variés partout en Océanie.

Miniature de proue de pirogue, culture Maori, Nouvelle-Zélande, XIXe siècle

Ces embarcations étaient en général très décorées de motifs aux significations puissantes et pouvaient transporter plusieurs dizaines d'hommes.
De même que la totalité des activités guerrières et des objets matériels en lien avec celles-ci, elles étaient entourées de nombreux interdits et de multiples pratiques magiques destinées à assurer le succès de l'entreprise. Dans la plupart des cas, les affrontements en Océanie étaient très ritualisés et faisaient intervenir des systèmes complexes de compensation du sang versé dans des échanges entre les acteurs.

Loin de n'être qu'un chemin d'attaque, le milieu marin fournissait aussi un certain nombre d'éléments qui s'intégraient à l'équipement du guerrier.
Ainsi des matières dures telles que la nacre, les dents de requins ou les coquillages apparaissaient par exemple dans de nombreuses armes et parures portées lors des guerres.

Pagaie cérémonielle, archipel des Australes, Polynésie française

Le concept de “mana” dans les îles du Pacifique

Les peuples d'Océanie vivent en corrélation avec les ancêtres, les esprits et les dieux.
Les motifs développés pour les représenter se retrouvent dans plusieurs formes d'expression artistique telles que tatouages, masques, statues, tablettes votives et armes cérémonielles.

Les objets d'art sont en effet utilisés pour entrer en contact avec les esprits ou les ancêtres, et pour les faire intervenir dans ce monde.

Ce pouvoir rejoint le concept de « mana ».

 

Statue Tiki, archipel des Marquises, Polynésie française, XIXe siècle

Ce terme signifie « puissance », « efficacité », « force de vie ».
Le mana peut être la manifestation du pouvoir des dieux dans le monde des hommes, il s'agit alors d'une force active, associée aux ancêtres et héritée de ces derniers.
Il est aussi considéré comme une substance invisible dont sont pénétrés les objets et les êtres humains.
Les hommes le reçoivent des esprits du clan par transmission généalogique ou encore l'obtiennent des dieux ou des forces cosmiques. Ils le conservent s'ils se comportent bien; sinon, ils le perdent. La possession du mana se révèle par la réussite dans les différentes actions.

Dans toutes les cultures où ce concept est en usage, l'œuvre d'art est l'un des principaux moyens permettant d'appeler le mana dans ce monde-ci.

Le choix des matériaux et de l'iconographie répond à cette préoccupation.

Étriers d’échasses, archipel des Marquises, Polynésie française

Massues U’u, archipel des Marquises, Polynésie française

Le corpus des célèbres massues u’u des îles Marquises est restreint et amplement documenté, en partie grâce au travail réalisé par le Musée du quai Branly.

Lors du vernissage de notre galerie en 2022, nous en exposions une au public, qui a trouvé un heureux acquéreur depuis.

Ci-dessous, divers types de massues et casse-têtes du Pacifique dont une massue Ula des îles Fidji dont un bel exemplaire est disponible à la galerie.

Masque Kanak, Nouvelle-Calédonie

Statuette Korwar, Papouasie-Nouvelle-Guinée

Masque Tapuanu, îles Mortlock / îles Carolines

C’est également un masque des îles Carolines qui détient actuellement le record du monde de prix payé par un enchérisseur : l’acheteur du masque tapuanu de la collection Michel Périnet a en effet du débourser 9 171 000 € chez Christie’s Paris en 2021 pour l’obtenir.

Appuie-nuque, rivière Pora-Pora, Papouasie-Nouvelle-Guinée

Des collections d’objets d’art tribal d’Afrique, d’Océanie et du Grand Nord à découvrir en bord de mer, à quelques heures de route de la Belgique.

Pour une découverte plus proche de chez vous, visitez notre galerie située au cœur de la ville de Nivelles, à quelques kilomètres de Bruxelles. Des chefs-d'œuvre moins connus vous y attendent.

Face à Face - Art africain et sculptures de Johan Baudart

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Les arts premiers se marient à l’art contemporain

Du 17 novembre au 11 décembre 2022, la galerie avait le plaisir de faire découvrir à Nivelles le travail de Johan Baudart au travers de sculptures en acier et de dessins ; lui-même passionné d’art africain et de ses formes toujours surprenantes.

La galerie présentait un face à face entre ces objets d’arts d’Afrique parmi lesquels des masques et statues Songye, mais aussi Dogon, Luena, et des fétiches Teke pour ne citer que quelques exemples.

Aux formes et patines rituelles, les courbes et teintes brutes de l’artiste offraient une belle réponse pleine de cohérence.

L’occasion de revenir en images sur cet évènement qui fut un grand succès amenant les amateurs d’art contemporain à entrevoir la richesse des arts premiers.

Crédits photo Karolyn Delisé-Hanse / Loiseau & Zajega

Vernissage de la Galerie Loiseau & Zajega au cœur de Nivelles

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Les Arts Premiers débarquent à Nivelles

Ce jeudi 26 mai 2022 marquait pour Stéphane et moi un grand tournant dans notre activité puisque nos locaux, au cœur de la ville de Nivelles, sont désormais prêts à accueillir officiellement tous les amateurs et passionnés d’arts des cinq continents venant de tous horizons.

Au terme de plusieurs années de réflexion, de travaux et de collecte de pièces magistrales, le vernissage de la galerie a été l’occasion de partager avec vous la concrétisation de notre projet centré sur les arts premiers. Une opportunité pour les Nivellois et bien plus encore de découvrir notre contenu, mais surtout, pour Stéphane et moi, de faire de nouvelles rencontres de la vie locale ainsi que de passionnés venant parfois de loin. L’occasion enfin de retrouver des amis et soutiens que la période Covid nous avait parfois fait perdre de vue.

Nous vous remercions chaleureusement toutes et tous pour votre présence, vos compliments et vos encouragements dans cette entreprise et espérons que vous avez pu ressentir autant d’émotion que nous, entourés par ces œuvres d’art tribal d’Afrique, d’Océanie et d’Amérique.

Vous avez été pas moins d’une centaine à franchir notre porte, cependant cette grande affluence de personnes en cette soirée des plus importantes, dont la délégation communale présidée par M. le Bourgmestre Pierre Huart, ne nous a pas toujours permis d’accorder beaucoup de temps à chacune et chacun d’entre vous, c’est pourquoi nous vous invitons à nous rendre visite prochainement afin de pouvoir discuter et partager en toute tranquillité dans ce cadre que nous avons souhaité agréable et innovant.

Nos remerciements vont également à nos partenaires et fournisseurs pour le succès de cette journée :

@Tribal Art Magazine, @Johan Baudart Sculpteur, @Un soir un vin, @Traiteur Robiette, @Karolyn Delisé-Hanse Photographe, @Banquet Locations, @Hôtel Vandervalk.

Retrouvez-nous désormais à la Rue Saint-Georges 23, Nivelles 1400.
Suivez également nos activités sur le site de la galerie.

Visite de la collection permanente d'art ethnographique du MRAC

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Musée royal de l’Afrique centrale

Visite des collections ethnographiques avec Galerie Loiseau & Zajega Arts

Loiseau & Zajega vous font découvrir aujourd’hui la collection permanente d’objets ethnographiques du Musée royal de l’Afrique centrale. Faute de pouvoir le visiter en cette première moitié d’année 2020, appréciez une sélection d’objets de République démocratique du Congo, d’Angola et de Zambie grâce à notre reportage photo. Cet article fait suite à la visite de l’exposition temporaire “Art sans pareil” que nous vous proposions en octobre dernier.
Pensez à cliquer sur les images pour les agrandir.

Statues du culte des ancêtres

Les statues d’ancêtres expriment la sagesse et la force spirituelle de l’ancêtre qui veille sur sa descendance. Elles occupaient une place centrale dans les offrandes et les rites visant à attirer les faveurs des ancêtres. Elles étaient également utilisées pour légitimer le pouvoir du chef ou confirmer son autorité sur un territoire.

  • Statue d’ancêtre Bembe EO.0.0.14798
    Baraka, Sud-Kivu - Cordia africana
    Offerte par M. Piletteo, 1913
    Cette statue représente un ancêtre Luba. La barbe et la coiffure en croix indiquent un statut social élevé.

  • Statue d’ancêtre Hemba EO.1992.28.1
    Sayi, Tanganyika - Milicia excelsa
    Offert par R. Boël, 1992
    Cette statue est l’oeuvre d’un artiste Hemba. Les mains symbolisent la succession des générations.

  • Statue d’ancêtre Kipona Hemba EO.1972.171
    Province du Katanga - Pterocarpus tinctorius
    Achetée à E. Deletaille, 1972

Les peuples Bembe attribuaient aux statues d’ancêtres un nom et une place dans l’arbre généalogique. Généralement, elles étaient conservées ensemble dans de petits sanctuaires.

Statues tombales Yombe

Au début du XXe siècle, des statues en bois hautes en couleur apparaissent sur les tombes yombe. Elles représentent un homme ou une femme tenant en main une bouteille et une tasse, voire un instrument de musique. Parfois, un parapluie ou un petit toit de bois et de feuilles de bananier les protégeait de la pluie.

  • Statue tombale Yombe : EO.0.0.1040-2
    Offerte pas H. Deleval, 1910

  • Statue tombale Yombe EO.1960.32.1
    Achetée à E. Beer, 1960

Entre la vie et la mort

En Afrique centrale, la mort est souvent considérée comme le passage du monde des vivants vers celui des morts. Les membres décédés de la famille y sont commémorés avec respect et déférence. Ils exercent un impact continu sur le bien-être des vivants, mais sont souvent imprévisibles.
Ceux qui ont mené une vie exemplaire et conçu une nombreuse progéniture acquièrent le statut d’ancêtres dans la mémoire de la société. Les ancêtres sont invoqués lors de problèmes divers, ou peuvent apporter la prospérité collective sous forme de pluie ou de succès à la chasse. Un ancêtre peut aussi se réincarner dans le corps d’un nouveau-né et revenir ainsi parmi les vivants.

Il émane de ces statues de l’autorité et de la dignité. Elles représentent probablement le chef tabwa Kansabala et son épouse, à moins qu’il ne s’agisse de leurs ancêtres. L’ajout de matières médicinales et de cornes d’antilope montrent que ces statues avaient également des fonctions protectrices. En 1884, ces statues ont été prises lors de l’expédition violente menée par le lieutenant Émile Storms à l’encontre des chefs tabwa Lusinga et Kansabala. Afin d’acquérir le contrôle de la région, Storms avait reçu l’ordre de soumettre les dirigeants africains à tout prix.

Jusqu’en 1930, ces statues se trouvaient dans la maison bruxelloise d’Émile Storms. Elles y figuraient parmi d’autre trophées témoignant de sa “victoire” sur les peuples tabwa.

  • Statue d’ancêtre Tabwa EO.0.0.31664
    Marangu, Tanganyika - Cola

  • Statue d’ancêtre Tabwa EO.0.31663
    Marangu, Tanganyika - Ficus mucuso
    Pièces saisies par Émile Storms en 1884 et offertes par sa veuve en 1930.

Seto et Nabo, statues des fondateurs Ngbaka

Ces statues représentent Seto et sa soeur et épouse Nabo, les père et mère originels des peuples Ngbaka. Seto et Nabo repoussaient les mauvais esprits et étaient invoqués en cas d’accident et de maladie, ou en cas de revers pendant la chasse.

  • Statue du fondateur mythique Seto Ngbaka EO.0.0.40032

  • Statue de la fondatrice mythique Nabo Ngbaka EO.0.0.40033
    Sud-Ubangi
    Pièces offertes par A. Bertrand, 1942

Masque et costume dans l’art africain

Un masque consiste en un masque couvrant le visage ou la tête, un costume et une chorégraphie. Ces éléments forment un tout indissociable mais sont rarement montrés ensemble en dehors de leur contexte d’origine. Avec leur goût de la sculpture figurative, les musées et collectionneurs occidentaux appréciaient surtout les qualités artistiques des masques faciaux ou couvrant la tête. Ils s’intéressaient moins aux costumes, notamment parce que ceux-ci étaient composés de matériaux plus périssables comme des fibres, des peaux et des plumes. Leur valeur artistique n’était guère reconnue et ils étaient rarement collectionnés.

  • Masque et son costume Kete EO.0.0.32538
    Mboie, Kasaï-Central - Vitex congolensis
    Offert par F. Wenner, 1930
    Les peuples Kete appartenaient au royaume Kuba et pratiquaient des rites funéraires complexes comparables. Ce masque dansait à la fin de la période de deuil, généralement un ou deux mois après le décès.

  • Masque Inuba Kuba EO.0.0.3704
    Kasaï-Occidental - Ricinodendron heudelotii
    Acquis avant 1898
    Le personnage d’Inuba intervenait lors des enterrements de chefs importants dans le sud de la région des peuples Kuba. Inuba approchait du cercueil et suppliait l’esprit du défunt de partir sans nuire à quiconque.

  • Masque Ishyeen imaalu Kuba EO.1951.31.213
    Kasaï - Ricinodendron heudelotii
    Acheté à R. Blondiau, 1951
    Ce masque dansait pendant les enterrements de membres de l’association des Babende. Les yeux en caméléon exorbités évoquent peut-être la capacité à voir l’invisible.

  • Masque Bongo Kuba EO.0.0.35309
    Kasaï-Occidental - Ricinodendron heudelotii
    Offert par H. Lambert, 1933
    Ce masque représente probablement Bongo, un personnage lié à l’association fermée des Babende. Les mouvements abrupts et débridés que le danseur masqué effectuait pendant la performance évoquent ses liens avec les ngesh, des esprits qui erraient dans la forêt.

Chaises européennes, images africaines

Les commerçants Chokwe reliaient les comptoirs européens de la côte aux peuples de l’intérieur du pays. Ces contacts donnaient aussi lieu à des échanges culturels et artistiques. Au XVIIIe siècle, les artistes Chokwe se sont mis à fabriquer des chaises d’inspiration portugaise. Elles sont devenues par la suite de véritables symboles de pouvoir.

  • Chaise Chokwe EO.0.0.20594
    Kasaï - Vitex donania
    Offerte par N. Arnold, 1917
    Cette chaise appartenait à un chef Chokwe. Les personnages qui ornent le dossier représentent des danseurs masqués.

  • Sceptre et tabatière Chokwe EO.0.0.41233
    Sandoa, Lualaba - Uapaca
    Acheté à Mrs R. Williame, 1945

Chez les Luba, les tabourets sont principalement utilisés pendant l’intronisation des chefs et des rois. Ils sont censés contenir l’esprit du chef politique et le protéger après sa mort. Le personnage sculpté représente la femme luba idéale.

  • Tabouret Luba EO.0.0.23137
    Ankoro, Tanganyika - Ricinodendron
    Acheté à F. Michel, 1919

Pendant leur intronisation, les chefs luba buvaient une boisson rituelle dans cette coupe. Les deux personnages qui tiennent la coupe représentent des esprits protecteurs. Les lézards qui ornent le couvercle rappellent les esprits terrestres que le chef devait garder sous contrôle.

  • Coupe Kiteya Luba EO.0.0.3861
    Tanganyika - Schinziophyton rautanenii
    Acquise avant 1898

Culture Lega : les objets d’art liés au bwami

Chez les peuples Lega, l’association bwami assurait la cohésion et la collaboration entre les villages. Elle a ainsi créé une forme d’organisation sociale et politique non centralisée. L’association bwami reposait sur une organisation hiérarchique. Les niveaux inférieurs s’occupaient de l’éducation morale des jeunes hommes. Les niveaux supérieurs n’étaient accessibles qu’aux hommes et aux femmes qui menaient une vie exemplaire et étaient prédestinés à assumer une fonction dirigeante au sein de l’association et du village. Les hommes ne pouvaient monter au plus haut niveau de la hiérarchie que si leurs épouses étaient initiées dans les grades féminins équivalents.

Les figurines en ivoire renvoyaient à des proverbes et avaient un rôle didactique. La dureté de l’ivoire représentait la continuité et des pouvoirs de guérison y étaient également attribués. Les figurines étaient transmises d’une génération à l’autre et acquéraient ainsi une patine douce et brillante très appréciée.

  • Statuette Iginga Lega EO.1955.3.136
    Pangi, Maniema
    Collectée par Biebuyck, 1952

  • Statuette Iginga Lega EO.0.0.38610
    Sud-Kivu
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

  • Statuette Iginga Lega EO.0.0.38694
    Sud-Kivu
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

  • Statuette Iginga Lega EO.1955.3.102
    Pangi, Maniema
    Collectée par Biebuyck, 1952

  • Statuette Lega EO.0.0.38582
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

  • Statuette Kalimbangola Lega EO.0.1959.35.2
    Maniema
    Achetée à A. Van Loo, 1959

  • Statuette Kamwenne ku masengo Lega EO.0.1955.3.150
    Pangi, Maniema - Alstonia congensis
    Collectée par Biebuyck, 1952

  • Statuette Wabalenga Lega EO.1955.3.145
    Pangi, Maniema
    Collectée par Biebuyck, 1952
    Cette figurine était un bien collectif. Elle représente Wabalenga “celui qui surpasse tout le monde”, l’initié supérieur sans qui il n’était pas possible de progresser au sein de l’association bwami.

  • Figurine animale Lega EO.1951.11.40
    Maniema
    Achetée à Mrs. Lemborelle, 1951

  • Figurine animale Lega EO.1951.11.41
    Maniema
    Achetée à Mrs. Lemborelle, 1951

  • Figurine animale Lega EO.0.0.38719
    Sud-Kivu
    Achetée à A. Van Hooren, 1939

Les masques bwami renvoient aux membres exemplaires du bwami des générations précédentes. Ils étaient surtout utilisés dans des installations didactiques pour les initiés des grades supérieurs. Pendant les rituels, ils étaient tenus devant le visage, ou contre la tempe, la nuque ou l’épaule. Les masques en ivoire étaient appelés “crânes paternels” et servaient pendant les enseignements sur la mort.

  • Masque Muminia Lega EO.1955.3.1
    Pangi, Maniema - Coelocaryon preussi
    Collecté par Biebuyck, 1952

  • Masque Lega EO.0.0.38753
    Maniema
    Acheté à A. Van Hooren, 1939

  • Masque Lukwakongo Lega EO.1955.3.4
    Pangi, Maniema - Crossopteryx febrifuga
    Collecté par Biebuyck, 1952

  • Masque Lukwakongo Lega EO.1962.46.1
    Pangi, Maniema - Alstonia congensis
    Acheté à Nicolas de Kun, 1962

  • Masque Lukungu Lega EO.0.0.38741
    Sud-Kivu
    Acheté à A. Van Hooren, 1939

  • Cuillère Kalukili Lega EO.1959.35.7
    Maniema
    Acheté à A. Van Loo, 1959

  • Cuillère Kalukili Lega EO.1953.29.4
    Sud-Kivu
    Achetée à M. Delorme, 1953

  • Cuillère Kalukili Lega EO.1955.3.94
    Shabunda, Sud-Kivu
    Collectée par D. Biebuyck

Les villages qui collaboraient sur une base d’égalité étaient beaucoup plus difficiles à intégrer dans le système colonial que les royaumes centralisés. Les autorités belges considéraient dès lors que les institutions bwami ne constituaient pas une base solide pour la gouvernance indirecte : elles les jugeaient trop incontrôlables, arriérées et suspectes. En raison de leur caractère fermé, elles étaient souvent considérées comme des associations “secrètes”, voire comme une forme organisée de résistance. En 1947, les autorités coloniales ont interdit toute les initiations bwami. Toutefois, certains fonctionnaires coloniaux sympathisaient avec les pratiques bwami et les toléraient.

Statues moralisatrices Lega

Les associations Lega n’avaient pas d’autorité centrale mais étaient dirigées par une association structurée de façon hiérarchique : le bwami. Celui-ci comprenait différents grades, dont les plus élevés n’étaient accessibles qu’aux couples mariés. Pendant les initiations, des installations éducatives composées de statues et d’objets symboliques étaient utilisées. Chaque statue représentait le personnage d’une métaphore ou d’un aphorisme et avait son propre nom. Elles servaient à enseigner les comportements moralement acceptables, et le rôle des hommes et des femmes au sein du mariage et de la société.

  • Statuette Wayinda Lega EO.1955.3.75
    Shabunda, Sud-Kivu
    Collecté par D. Biebuyck, 1952
    Offert par l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale, Lwiro, 1955
    Ce personnage est Wayinda, une femme adultère tombée enceinte de son amant et ayant attiré ainsi la malédiction sur sa propre personne et sur sa famille. La statue évoque un proverbe : “Wayinda s’est tuée elle-même par souillure rituelle”.

  • Statuette Kakulu Lega EO.0.0.35409
    Kunda, Maniema
    Offerte par R. Baude, 1934
    Cette statue représente probablement Kakulu, “le malheureux époux trompé”. Il est le mari de Wayinda enceinte de son amant ou de Mukobania, la séductrice frivole qui aime semer la discorde.

  • Statue Mutu Nyabeidilwa Lega EO.1955.3.42
    Pangi, Maniema
    Collecté par Biebuyck, 1952
    Offert par l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale, Lwiro, 1955
    Cette statue représente une femme qui ne cesse de fuir son mari et de retourner dans sa famille. Elle renvoie à un proverbe : “Calao a été surprise la nuit. Où qu’elle aille, elle doit toujours être rappelée à la maison.”

  • Statue Katanda Lega EO.1955.3.40
    Pangi, Maniema
    Collecté par Biebuyck, 1952
    Offert par l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique centrale, Lwiro, 1955
    Cette statue représente Katanda, une mauvaise femme adultère. Elle est tout ce qu’une femme bwami honnête ne doit pas être.

Les devins-guérisseurs en République démocratique du Congo

Les catastrophes naturelles, épidémies et autres coups du destin étaient généralement considérés comme des maladies sociétales. Celles-ci étaient à leur tour attribuées à une relation perturbée avec le monde des esprits. Pour éviter de tels malheurs et pour assurer le bien-être de la société, les chefs et aussi les gens ordinaires recouraient aux services de devins-guérisseurs, qui intervenaient en tant que médiateurs auprès du monde surnaturel.

Pour communiquer avec les esprits, le devin-guérisseur frappe en rythme sur un petit tambour à fente. Chez les peuples Yaka, chaque devin-guérisseur avait son propre esprit protecteur, qu’il invoquait à chaque rituel.

  • Tambours à fente masculin et féminin Yaka
    Gingungi, Kwilu
    Collectés par J. Thienpont, collection de l’ordre des Jésuites

Les peuples Kuba considéraient certains animaux comme des messagers du royaume des esprits. Un grand nombre de leur statuettes de divination représentaient ces animaux. Le devin-guérisseur frottait le dos de la statue avec un disque en bois tout en posant des questions. Lorsque le mouvement bloquait, il l’interprétait comme une réponse des esprits.

  • Oracle à friction Itombwa Kuba EO.0.0.20145
    Kasaï - Crossopteryx febrifuga
    Acheté à H. Pareyn, 1917

  • Oracle à friction Katatora Luba EO.0.0.23472
    Katanga - Crossopteryx febrifuga
    Acheté à la veuve de J. Michaux, 1919

  • Oracle à friction Katatora Luba EO.1980.2.1616
    Katanga
    Ex J. Walschot, 1980

Le devin-guérisseur et son client introduisaient chacun un doigt dans la partie creuse desobjet de divination Katatora. Pendant qu’ils le frottaient ensemble sur une natte, le devin-guérisseur interrogeait son client sur les causes du malheur qui l’avait frappé. Sous l’influence des esprits des ancêtres, l’objet effectuait des mouvements qui étaient ensuite interprétés par le devin-guérisseur.

L’association lemba dans le Mayombe

Lemba était une association rituelle active jusqu’au début du XXe siècle au nord du fleuve Congo inférieur. Lorsqu’une personne était admise dans l’association, cette adhésion s’accompagnait d’un mariage. En outre, un objet de force était confectionné en vue d’être utilisé par la suite dans des rituels de guérison. L’accès à l’association lemba était très coûteux, car il fallait offrir à boire et à manger à des centaines d’invités. Dans une société où l’égalité était une valeur importante, ce type de générosité contribuait à atténuer les conflits sociaux. L’investissement dans un moyen curatif était également bon pour l’image des riches membres du lemba, car il les protégeait contre la jalousie des autres.
Différents objets lemba représentent un couple marié. Leurs attributs et les postures qu’ils adoptent symbolisent la richesse, l’autorité et leur initiation aux arts rituels.

  • Objet de force, représentation d’un couple lemba Yombe EO.0.0.42920
    Mayombe
    Offert par L. Bittremieux, 1946

  • Objet de force, représentation d’un couple lemba Vili EO.1979.1.259
    Djéno, Kouilou
    Collecté par E. Dartevelle, 1938.

Art tribal africain et initiation mukanda

Aujourd’hui, les garçons luvale sont généralement initiés durant les vacances scolaires. Les mascarades makishi de fin d’initiation ont évolué jusqu’à donner lieu à de grandes fêtes et à des rassemblements sociaux et politiques importants. Parfois, les festivités éclipsent même l’objectif initial de l’école mukanda : l’éducation et l’enseignement.

  • Masque Nyau Chewa EO.2002.2.1
    Province du Sud, Zambie
    Collecté par B. Wastiau, 2002

  • Masque Katoyo Luvale EO.2002.2.41
    Province du Sud, Zambie
    Collecté par B. Wastiau, 2002
    Avec son nez pointu et sa moustache raide, ce masque représente un Européen. Il était utilisé lors des danses pour représenter les Européens comme des être gauches aux habitudes sexuelles étranges.

Art du Kongo Central et d’Angola

Dans la région du Mayombe (province du Kongo-Central), l’éducation des garçons comme des filles s’accompagnait d’une phase rituelle qui se déroulait dans un lieu isolé. Les garçons allaient à l’école khimba, un camp dans la forêt où ils recevaient l’enseignement d’un maître ainsi qu’un nouveau nom khimba. Les filles qui avaient atteint l’âge de se marier allait vivre dans la maison kumbi, où la vie de femme adulte leur était enseignée. Parfois, leur futur époux passait leur apporter des cadeaux.

  • Sceptre de danse Kongo EO.0.0.35045
    Muanda, Kongo-Central - Crossopteryx febrifuga
    Offert par L. Bittremieux, 1933
    Ce sceptre de danse khimba accompagnait la procession des garçons qui retournaient au village après leur séjour dans le camp en forêt. Il représente les deux garçons qui quittent le camp les premiers.

  • Fragment d’un montant de lit kumbi Yombe EO.0.0.35776
    Kangu, Kongo-Central - Adansonia digitata
    Offert par N. De Cleene, 1934
    Le lit dans la maison kumbi était orné de statuettes de filles et de leurs futurs époux. Leurs oncles maternels négociaient la dot.

Au début de la période coloniale, bien avant la reconnaissance de l’art africain en tant que tel, les statues de maternité de la région du Mayombe étaient très recherchées des collectionneurs. Les missionnaires et les médecins appréciaient particulièrement la manière dont elles exprimaient l’amour et le dévouement maternel. Les statues n’étaient pas tant collectionnées pour leur valeur ethnographique que pour leurs qualités artistiques. C’est pourquoi elles étaient souvent astiquées.

  • Statue de mère et enfant Pfemba Yombe EO.1948.371
    Mayombe, Kongo-Central - Nauclea pobeguinii
    Offerte par L. Bertrand, 1948
    Cette statue soigneusement astiquée a les yeux blancs accentués encore par des incrustations de verre en demi-lune. Le couvre-chef de forme mitrale est fréquent chez les statues phemba.

  • Statue de mère et enfant Pfemba Yombe EO.0.0.19848
    Mayombe, Kongo-Central - Celtis durandii
    Achetée à N. Arnold, 1917

  • Statue de mère et enfant Pfemba Yombe EO.0.0.24662
    Mayombe, Kongo-Central - Nauclea latifolia
    Ex J. De Briey, 1920

  • Statue de mère et enfant Yombe EO.1961.11.5
    Mayombe, Kongo-Central
    Achetée à J. Walschot, 1961
    Cette statue de mère et enfant est d’une taille inhabituelle et entièrement teinte en rouge. Les scarifications et les dents renvoient à l’idéal de beauté féminine des peuples yombe.

  • Statue de mère et enfant Vili EO.0.0.16610
    Cabinda, Angola
    Acquise avant 1898

  • Statue funéraire Ntadi Kongo EO.1953.32.24
    Noqui, Angola
    Achetée à R. Verly, 1953

Fertilité et autorité

Pour la plupart des habitants d’Afrique centrale, le fait d’avoir des enfants est un aspect important d’une vie accomplie. En témoignent les nombreuses statues de maternité réalisées par des artistes de régions et de périodes différentes.
Elles renvoient naturellement à la fertilité et à la reproduction, mais aussi, de manière plus générale, à la survie de la société, ce qui était l’une des responsabilités rituelles du chef. Ainsi les statues de maternité étaient-elles aussi souvent associées au pouvoir politique.

  • Mortier à tabac en forme de mère avec son enfant EO.1953.74.5465
    Tshikapa, Kasaï - Rubiaceae
    Collecté par A. Maesen, 1955

  • Statue de mère et enfant Luluwa EO.0.0.7157
    Kasaï-Central - Balanites wilsoniana
    Achetée à De Bruyn, 1912

Les statues pindi représentent souvent un homme et une femme, qui porte un enfant. Les chefs Mbala invoquaient la force de ces statues en cas de guerres, de mauvaises récoltes, d’épidémies ou de catastrophes naturelles. Les statues pindi jouaient également un rôle dans les rituels de succession et lors de l’intronisation d’un nouveau chef.

  • Statue de mère et enfant Mbala EO.0.0.16605
    Kwilu
    Acquise avant 1898

  • Statue de mère et enfant Yaka EO.0.0.44737
    Kwango - Crossopteryx febrifuga
    Offerte C. Elter, 1947

  • Statue de mère et enfant Yaka EO.0.0.35922
    Kwango
    Achetée à J. Javaux, 1935

  • Statue de mère et enfant Khosi Yaka SJ.388
    Ngowa, Kwango
    Collectée par J. Van Wing

  • Statue de maternité EO.1979.1.221
    Maquela do Zambo - Crossopteryx febrifuga
    Collectée par E. Dartevelle, 1938

Figures Mankishi : statues protectrices de la fertilité

Les peuples Songye avaient des statues dotées de forces particulières (mankishi, sing. nkishi). Ils les utilisaient pour guérir les maladies et se protéger. Les mankishi de petite taille servaient à résoudre des problèmes personnels ou familiaux. Les grands mankishi protégaient la société des accidents et de la sorcellerie. Ils assuraient la fertilité des femmes et aidaient les esprits des ancêtres à se réincarner dans les corps des nouveaux-nés.

Les grands mankishi étaient généralement commandés à des sculpteurs de renom et servaient au village durant de nombreuses générations. Ils étaient activés au moyen de substances dotées de forces naturelles introduites par le nganga dans des cavités pratiquées dans la tête et le ventre de la statue. Le nganga est l’expert rituel capable de communiquer avec le monde des esprits.

  • Objet de force Nkishi Songye EO.1980.2492
    Lomami
    Ex J. Walschot, 1980
    Les baguettes incurvées de nkishi renvoient probablement à la créature mythique de “l’arc-en-ciel”. Il capte les esprits des défunts au moyen de deux crochets et les renvoie à la terre, où ils se réincarnent dans les corps des nouveaux-nés.

Masques de bois et de fibres

  • Masque Yaka EO.0.0.31424
    Kwango - Alstonia congensis
    Ce masque était tenu devant le visage à l’aide d’une poignée. La maisonnette évoque le futur logement des garçons initiés, prêts désormais à fonder une famille et à procréer.

  • Masque Kamdaandzya Yaka SJ.1327
    Kingunda, Kwango
    Collecté par A. Pauwels. Collection de l’ordre des Jésuites, 1929.
    Ce masque en fibres représente Tsetsi, une petite antilope rusée qui, dans les fables, échappe toujours aux prédateurs. Pendant le mukanda, elle faisait figure d’exemple pour les garçons.

  • Masque-heaume Suku EO.0.0.15374
    Kindundu, Kwilu - Ricinodendron heudelotii
    Offert par la Compagnie du Kasaï, 1913
    Les artistes des peuples Suku réalisaient d’élégants masques à visage blanc et les décoraient avec des scènes représentant des humains, des oiseaux ou d’autres animaux.

  • Masque Kisokolo Nkanu EO.1991.21.2
    Kimvula-Madimba, Kongo-Central
    Créé par Ignace Magebuka, 1991
    Acheté à A. Van Damme, 1991
    Kisokolo représente un coureur de jupons. Son nez recourbé est un symbole phallique. À la fin du mukanda, il dansait avec le masque féminin makemba en effectuant des mouvements sensuels.

  • Masque Ndeemba Yaka EO.0.0.1929-2
    Popokabaka, Kwango - Alstonia congensis
    Offert par A. Verhavert, 1910
    Le nez de de ce masque représente une trompe d’éléphant, symbole de virilité. À la fin du mukanda, il était coupé et brûlé. Les cendres étaient utilisées comme amulette de fertilité lors du mukanda suivant.

  • Masque Kakuungu Suku EO.0.0.26520
    Gingungi, Kwilu
    Offert par J. Van Wing, 1922
    Ce masque Kakuungu, était porté par les maîtres initiateurs. Il effraie et impose l’obéissance tout en protégeant les garçons contre la sorcellerie. Le jour de la circoncision, Kakuungu encourageait les garçons à se montrer courageux.

  • Masque-heaume Hemba Kwese EO.0.0.37175
    Kikwit, Kwilu - Ricinodendron heudelotii
    Offert par J. de Decker, 1937
    Ce masque-heaume, qui recouvre entièrement la tête du danseur, est typique des peuples hemba. Il a été réalisé dans un bloc de bois évidé.

  • Masque Gitenga Pende de l’Ouest EO.1980.2.1162
    Kwilu
    Ex J. Walschot, 1980
    Gitenga était le meneur d’un groupe de masques aux yeux exorbités et vêtus de filets. Ensemble, ils semaient la terreur dans le camp. Gitenga représente le soleil couchant et symbolise la régénération.

  • Masque Pwo Chokwe EO.0.0.32510
    Région de Tshikapa, Kasaï - Alstonia
    Offert par A. Gohr, 1930
    Ce masque représente la femme idéale mais était porté par un homme. Pwo porte de superbes scarifications et des dents limées (deux signes de beauté) et est un être surnaturel bienveillant.

  • Masque Luluwa EO.0.0.3341-3
    Kasaï-Occidental - Alstonia congensis
    Acheté à H. Pareyn, 1911
    Les peuples Luluwa ont repris les pratiques et les masques du mukanda de leurs voisins Chokwe. À la fin de l’initiation, ce masque chassait les mauvais esprits au moyen de son épée.

La collection d’art africain Aloïs Tembo

Aux environs de Kangu, un village de la région du Mayombe (province du Kongo-Central), une collection unique de statues de force a été constituée en 1915. Ces objets, qui se représentent sous des formes humaines, animales et autres, avaient été données par leurs propriétaires à la mission catholique. Aloïs Tembo, un catéchiste local, a consigné le nom de ces statues et noté celles qui étaient utilisées à des fins divinatoires, médicinales ou de protection spirituelle.

  • Statue de pouvoir Nkisi Manyangu Yombe EO.0.0.22485
    Mayombe
    Achetée aux Missionnaires de Scheut, 1919
    Ce nkisi impressionnant était connu sous le nom de Manyangu. Il provoquait le lubanzi chez ses victimes, une maladie qui s’accompagne de points de côté et de difficultés respiratoires.

  • Statue de pouvoir Nkisi Mambuku Mongo Yombe EO.0.0.22438
    Mayombe
    Achetée aux Missionnaires de Scheut, 1919
    Mambuku Mongo était un nkisi qui se présentait tantôt sous forme humaine, tantôt sous forme non figurative. Il était surtout utilisé à des fins divinatoires, mais il pouvait aussi donner des maux de tête ou même provoquer la folie. Les propriétaires étaient souvent des femmes qui dansaient, chantaient, secouaient des hochets et reniflaient la statue pour savoir ce que le nkisi avait à dire.

Renommée et prestige : art royal Kuba

Grâce aux premières collections d’art kuba et aux ouvrages des premiers anthropologues tels qu’Émil Torday (1875-1931), celui qui a acquis la statue ndop du roi Miko miMbul, les milieux européens ont rapidement pris conscience que les peuples kuba avaient une culture matérielle très développée. Cette réputation a contribué à ce que le royaume kuba puisse conserver une position relativement autonome au sein de l’état colonial. La cour kuba entretenait aussi des contacts avec le monde extérieur. Ainsi, Mbop Mabinc maKyeen, qui a régné de 1939 à 1969, a reçu à plusieurs reprises des visites royales européennes et entretenait une correspondance avec des personnes en dehors du Congo.

Les ndop sont des statues commémoratives pour les rois (nyim). L’identité du roi est indiquée par l’ibol, le symbole personnel de sa royauté, représenté devant lui. Ce ndop représente le roi Miko miMbul, qui a régné au début du XIXe siècle. Son ibol est parfois interprété comme représentant une jeune esclave.

  • Statue royale Ndop Kuba EO.0.0.27655
    Mushenge, Kasaï - Crossopteryx febrifuga
    Collectée par Mr. Vandenabeele. Offert par les Amis du Musée, 1924

  • Coupe anthropomorphe Kuba EO.0.0.2555-7
    Kasaï-Occidental
    Acquise avant 1898
    Ce récipient a la forme d’une tête humaine. Les jambes sont directement rattachées à la nuque. Les détails du visage rappellent le style de certains masques kuba.

  • Appui-tête Kuba EO.0.0.19224
    Kasaï-Occidental - Crossopteryx febrifuga
    Collecté par J. Maes, 1914
    Des objets utilitaires de la vie quotidienne, comme les appui-têtes, témoignent eux aussi de la maîtrise atteinte par les artistes kuba sur le plan de la conception, du jeu des lignes et des volumes.

La liste d’objets présentés dans cet article n’est bien entendu pas exhaustive et nous vous encourageons à visiter le Musée royal de l’Afrique centrale afin d’en découvrir les chefs d’œuvre. Les collections ne se limitent d’ailleurs pas aux objets d’art tribal mais comportent également un échantillon des richesses minérales et biologiques de la République démocratique du Congo ainsi qu’une aile dédiée à l’histoire coloniale belge.

Ticuna. Peuple d'Amazonie : Retour sur l'expo-immersion au MÜM

Administrateur Administrateur

Si en ce début d’année 2020 le confinement dû au covid-19 nous prive de nos visites culturelles et rencontres constructives entre passionnés d’art tribal, il a le mérite de nous obliger à ralentir le rythme de nos vies quotidiennes ; mettons à profit cette pause pour redécouvrir nos propres collections qui, à la maison ou au bureau, nous sont devenues quelque peu invisibles, se fondant dans notre environnement. Il nous libère aussi du temps pour explorer nos bibliothèques en parcourant les nombreux ouvrages poussiéreux que nous n’avons pas encore vraiment ouverts ; du temps aussi pour revenir sur l’année écoulée et, pour moi, de vous emmener au cœur de la forêt amazonienne au travers de l’exposition temporaire du Musée du Masque de Binche dédiée au corpus artistique des Ticuna, peuple ancestral d’Amazonie. Rendons-nous donc dans l’ouest du Brésil, non loin des frontières péruvienne et colombienne.
Dans ce billet, j’ai joint des photos personnelles prises dans la réserve naturelle de Tamshiyacu-Tahuayo au Pérou, son environnement très similaire à celui de la région des Ticuna me paraît compléter de façon pertinente le contenu de l’exposition, figurines et masques traditionnels, ainsi que les reconstitutions impressionnantes de réalisme mises en place par Olivier Desart et son équipe.

Des eaux, Yoi, fils du créateur, repêcha les Magüta (Ticuna).

Selon le mythe créateur, cette grande peuplade d’Amazonie appelée Magüta — “peuple repêché avec un bâton” — jusqu’à l’arrivée des colons occidentaux au XVIIème siècle, puis Ticuna — “hommes peints en noir” — serait sortie des eaux du fleuve brésilien Eware après que la divinité Ngutapa eut créé le monde comprenant sa faune et sa flore exceptionnellement abondantes.

En ces lointaines contrées équatoriales où se bousculent une infinité de formes de vie animales et végétales, agressives et pacifiques, diurnes et nocturnes, terrestres et aquatiques, le monde des hommes est inextricablement lié à la nature sauvage qui l’entoure. La culture et l’art sont, ici peut-être davantage que partout ailleurs dans les sociétés animistes traditionnelles, profondément imprégnés des créatures et des esprits de la brousse.

Le visiteur s’aventure progressivement dans un dédale vert de plus en plus sombre.

La Fête de la Nouvelle Fille : rite de passage

La cosmogonie et les croyances Ticuna sont tout naturellement organisées autour de la forêt qui les entoure. Ainsi, on retrouve plusieurs divinités dont les rôles et représentations sont variés mais qui possèdent tous un rôle religieux, social ou moral. À l’instar de groupes ethniques d’autres continents, on retrouve chez les Ticuna un rituel initiatique appelé Fête de la Nouvelle Fille. Cette initiation féminine se déroule dans une grande hutte de plus de 60 mètres carrés, similaire à celle recréée dans le musée pour l’occasion. Cette initiation longue de plusieurs jours est dédiée au passage de l’état d’enfant à celui d’adulte chez la jeune femme qui, pour la première fois, a ses menstruations. À cette occasion, des personnages masqués représentant des entités bien spécifiques apparaissent et inculquent à la jeune femme les codes moraux et sociaux dont elle devra faire montre afin de conserver la bienveillance des esprits.

Reconstitution de la case dédiée à la Fête de la Nouvelle Fille. Les entités masquées se succèdent pour harceler la jeune fille qui sera défendue par sa famille.

Les entités de la forêt - Masques et costumes

Parmi les masques traditionnels, on retrouve divers personnages mythiques.
Yoi, fils du dieu Ngutapa, qui fit émerger les Ticuna de la rivière. Bienveillant, il s’oppose à son frère malveillant appelé Ipi qui avec Ocae, un autre personnage néfaste, est à l’origine des créatures dangereuses et des parasites ennemis des hommes.
Curupira et Mapinguari, protecteurs de la forêt peuvent être représentés par des masques mais aussi par des figurines. Leur allure surnaturelle effrayante, sortes de yetis tropicaux, inspire la crainte. Curupira peut néanmoins se montrer bienveillant.
On peut aussi nommer Beru, protectrice des fruits et Wüwürü propriétaire et gardien des palmiers buriti. Yureu, garant de l’organisation sociale et des bonnes mœurs, lutte contre l’inceste et la consanguinité. Mawu et O’ma, Yewae et Toü sont encore d’autres entités apparaissant en diverses occasions et dont les pouvoirs concrets peuvent être ressentis.

Les masques Ticuna sont fabriqués en bois léger (balsa) et/ou en liber d’écorce blanc, rouge ou brun, le tururi, qui est posé sur une armature des fibres végétales. Le tururi est la couche intermédiaire entre l’écorce et le tronc d’arbre. Il est obtenu en tapotant l’arbre avec un bâton puis est retravaillé, lavé et séché. Les peintures appliquées ensuite sur le tururi sont faites de pigments naturels et le bois est recouvert d’une résine noire. Parfois des poils, des dents, des crânes ou des mâchoires d’animaux sont ajoutés aux masques.

Ces entités se répartissent l’enseignement et la mise en application du respect de la nature et des esprits mais aussi des traditions et normes morales dont les interdits. Elles possèdent toutes une histoire, une personnalité et des caractéristiques physiques propres.
Les Ticuna rattachent aux humeurs de ces entités des choses inexplicables telles que la foudre, les tempêtes et d’autres événements de la forêt et du cosmos.

Figurines représentant les entités de la forêt.

Un autre récit mythologique est celui du dauphin rose de l’Amazone appelé Boto. Ce récit ne se limite pas au groupe Ticuna, on le retrouve en effet dans la tradition orale d’autres peuplades amazoniennes. À nouveau, cette fable comporte une morale sous-jacente. L’entité séduisante tentant de camoufler sa vraie nature a pour but d’emmener les jeunes insouciants charmés vers le monde sous-terrain. Il est donc de coutume de se méfier de cette espèce lorsqu’on l’aperçoit. Bien sûr, Boto intervient également lors de la fête de la Nouvelle Fille mais la famille de la jeune fille la protège et la prémunit du charme mortel de la passion.

La nuit approche et Boto, l’entité charmeuse, émerge discrètement. Si la chance lui sourit, il persuadera une jeune fille imprudente de le suivre et la gardera à jamais dans les profondeurs des eaux troubles de l’Amazone.

Nature et culture : des patrimoines menacés

Depuis l’arrivée des Occidentaux en Amérique du Sud, la menace pesant sur la forêt, ses habitants et leur culture n’a cessé de croître. Avec l’appât du gain bravant les enseignements des entités bienveillantes de la forêt, le risque est grand de voir disparaître définitivement ces patrimoines de tradition orale et naturels uniques. Dans cette optique de reconnaissance et de préservation, le musée a décidé de dédier cette exposition à l’un des figures de proue du peuple Ticuna : Pedro Inacio Pinheiro Ngematücü. Ardent défenseur au vécu bien chargé, lui-même victime des dérives de la colonisation, il fut décoré du prestigieux prix Roma Brasilia Città della Pace en 1991 pour son engagement dans la défense des droits humains. L’équilibre harmonieux entre l’Homme et la nature est en danger, et par là, les moyens de subsistance sont menacés eux aussi.

Curupira, entité insaisissable que peu de vivants ont vu, veille sous la canopée.

Pour le plaisir des yeux, voici encore quelques photos prises in situ et dans l’exposition.
Un catalogue interactif est mis à disposition via ce lien.
Cette exposition n’aurait pas été possible sans Daniel De Vos, passionné de l’Amazonie et ami des Ticuna.

Art sans pareil - Statues et masques africains de R. D. Congo au MRAC

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Les trésors de l’exposition : Tabwa, Luba, Tumba, Yanzi, Suku,…

Africa Museum - L&Z Arts en visite

Galerie L&Z Arts était récemment de passage au MRAC (Musée royal de l’Afrique centrale) à Bruxelles pour une visite de l’exposition temporaire “Art sans pareil”. L’occasion de découvrir une sélection parmi les plus belles statues et les plus beaux masques majoritairement issus de République démocratique du Congo. Parmi ces pièces, nombre d’entre elles nous semblent bien familières à nous, marchands et amateurs d’art tribal africain du fait qu’il s’agit des objets très fréquemment rencontrés dans les livres dédiés au sujet qui nous intéresse. Les découvrir de ses propres yeux se révèle cependant être une expérience incomparable avec l’image que l’on peut se faire de ces objets au travers des livres.

L’art tribal africain selon une démarche ethnographique

Résolument à contrepied de la démarche de l’exposition incarNations que nous avions précédemment visitée, la démarche de cette exposition semble résolument ethnographique. Dans de grandes vitrines modernes, un vaste ensemble significatif visant à illustrer la production artistique de la région grâce à des pièces phares datant principalement du XIXème siècle et de la première moitié du XXème.
Au travers de cette exposition, le visiteur découvre les dénominations et significations culturelles des œuvres mais aussi les logiques stylistiques qui ne sont pas figées mais ont bel et bien évolué dans le temps et l’espace au gré des relations interethniques et de la colonisation.

Une exposition des plus instructives donc grâce à une scénographie propre et moderne agrémentée de nombreuses informations suffisamment concises pour ne pas étouffer le visiteur lambda et dès lors, peut-être susciter un début d’envie de collectionner des chefs d’oeuvre, mais ravira aussi les spécialistes et amateurs confirmés.

Masques, statues, ivoires et autres : les classiques de l’art africain

Concrètement, dans les grandes vitrines sont présentés un ensemble de masques Yaka et Suku mais aussi de plus petits groupes que l’on rencontre moins fréquemment. On ne peut qu’être émerveillé par les infinies combinaisons de motifs, textures, volumes et formes qui donnent naissance à des masques et statues surprenants chez les Luntu, Kumu, Woyo, Pende et bien d’autres.

Du côté des statues et figurines, une vaste sélection de pièces Bembé, Tabwa, Hemba, Metoko, etc est rassemblée en regard d’autres vitrines où trônent les œuvres Luba de plusieurs ateliers dont le Maître de Buli ainsi que des figures de maternités et autres puissants fétiches type Nkishi Nkondi de l’ethnie Kongo et Yombe.

Un petit espace est également réservé aux ivoires. Parmi ceux-ci, on notera bien sûr des masquettes et figurines liées à l’initiation Bwami chez Lega mais aussi des pendentifs Pende Ikohoko, sceptre Kongo Yombe et bien d’autres encore. Masques Chokwe et diverses figures Songye des plus impressionnantes sont également visibles. Afin d’éviter que cet article ne devienne une liste indigeste d’objets et de groupes ethniques, nous ne pouvons que vous encourager à visiter cette exposition temporaire qui s’inscrit dans le renouveau du MRAC au sein duquel on trouve bien entendu de l’art tribal mais aussi des salles dédiées à la faune, la flore et toutes les autres richesses minières et culturelles de R. D. Congo. L’album photo complet de notre visite est disponible sur notre compte Facebook, nous serons ravis de vous compter parmi nos amis.

 

Musée royal de l'Afrique centrale

Leuvensesteenweg 13
3080 Tervuren
www.africamuseum.be

Commissaire de l’exposition : Julien Volper
Scénographie et graphisme : Niek Kortekaas & Johan Schelfhout




BOZAR : incarNations - Exposition d'art tribal et contemporain africain à Bruxelles

Administrateur Administrateur

Fétiche à clous revisité de la série Twilight of the Idols - Kendell Geers, entouré d’un petit fétiche Nkisi et d’un crucifix Kongo.

Très prochainement se clôturera l’exposition d’art africain incarNations African Art as Philosophy installée à Bruxelles depuis la fin du mois de juin. Découvrez le contenu de cette exposition originale en images.

Dans les grands halls Horta du Palais des Beaux-Arts, le visiteur découvre l’art africain hors du prisme occidental. On y adopte un point de vue afrocentré, loin de toute vision esthétique unilatérale et ethnographique. Un parcours interactif se déroule de salle en salle, mêlant tableaux, œuvres photographiques, audiovisuelles, et sculptures issues d’artistes africains contemporains, ponctué d’objets d’art tribal des plus classiques.
Les œuvres contemporaines ont été soigneusement sélectionnées par l’artiste sud-africain Kendell Geers parmi une collection prestigieuse : celle de l’homme d’affaire congolais passionné depuis l’enfance, Sindika Dokolo. Les pièces d’art tribal proviennent quant à elles de noms bien connus parmi lesquels B. de Grunne, Y. Ferrandin, P. Mestdagh, B. Dulon, D. Claes, Sotheby’s,…

Du côté sensoriel, la visite se déroule au rythme de plusieurs vidéos dont, pour ne citer que lui, le très bon titre I fink u freeky réalisé par Die Antwoord, groupe que Marius Bosch décrit comme une “adorable entité bâtarde d’Afrique du Sud, issue de l’amour de plusieurs cultures, noires, blanches colorées”. Une ambiance sonore hip-hop rave indéniablement inhabituelle pour les férus d’expositions d’art ethnographique silencieuses et aseptisées qui apporte une expérience émotionnelle bien originale.

À l’origine de cette démarche, plusieurs questions. Qu’est-ce que l’art africain ? Existe-t-il ou s’agit-il de la projection d’un concept occidental masquant l’expression culturelle de ces objets ? Comment présenter ces objets de façon moderne et concordante dans le contexte de la création contemporaine ? La simple profusion de terminologies entourant ces œuvres (art tribal, art primitif, art nègre, art ethnographique, art traditionnel,…) permet de prendre la mesure de la tâche à accomplir.
Cette exposition est l’aboutissement de pas loin de dix ans de travail et de réflexion. Elle n’a cependant pas la prétention de vouloir ou pouvoir répondre à toutes ces questions.
Au travers de sa scénographie (réalisée par Bruno De Veth) et du choix des œuvres présentées, incarNations exprime la volonté de placer le spectateur dans une optique africaine avec un fil conducteur philosophique.

Remettre l’église au milieu du village… ou la mappemonde à l’endroit

L’exposition accueille le visiteur avec plusieurs cartes du globe placées à l’envers. La raison ? Pourquoi cette acceptation généralisée du monde présentant le Nord orienté vers le haut alors que notre planète n’est après tout qu’une sphère dénuée de sens flottant dans le vide sidéral ? Les cartographes européens dessinèrent dès les prémices une Europe placée au dessus et généralement supérieure à ses dimensions réelles conformément à la conception d’une supériorité de l’Occident sur le reste du monde en terme de culture et d’éducation. Le ton est donné, ou plutôt la perspective.

La réflexion qu’on peut même qualifier de revendication ne s’arrête pas là. Souleymane Bachir Diagne appelle à un renouveau de la mise en scène des objets. Celui-ci défend la thèse selon laquelle les musées ethnographiques sont une négation de l’art. L’ethnographie, originellement créée dans un contexte colonial, offre une approche purement scientifique de ce qui est extérieur. Bachir Diagne se réfère à Malraux qui théorisa cette séparation de la pièce en tant qu’objet d’intérêt visuel d’une part, et de son usage d’autre part. Malraux, qui désigne cette scission sous le terme de métamorphose, la considère pleinement accomplie lorsque l’art n’a plus d’autre fin que lui-même.

Dundo Project : l’Angola à la recherche de ses trésors

On l’aura compris, l’exposition place le visiteur au cœur de l’expérience africaine dans un monde occidentalisé, depuis l’esclavage jusqu’à l’ascension actuelle de l’art contemporain africain en passant par le Black Panther sans manquer d’aborder la question polémique de la restitution des œuvres d’art traditionnel à leurs pays d’origine. Dans ce contexte, on mentionnera l’incontournable projet Dundo auquel l’une des salles de l’exposition est dédiée : au centre, un petit masque Chokwe et un chasse-mouche Lwena trônent dans leurs cubes de verre entourés de murs couverts des fiches signalétiques d’objets autrefois exposés au Musée Régional de Dundo en Angola, ceux-là même qui furent pillés lors de la guerre civile (1975-2002). À la base, une initiative lancée par Sindika Dokolo qui a déjà permis l’identification de plusieurs objets, avec pour objectif leur restitution à l’Angola.

Projet Dundo - Identification et rapatriement des objets du Regional Museum of Dundo

L’exposition incarNations née d’une émotion ressentie par son initiateur se place quoi qu’il en soit à point nommé dans une démarche très actuelle alliant art classique et art contemporain africains. Une tendance qui semble partie pour durer et qui offre à la fois une reconnaissance méritée aux talents d’un continent étonnamment sous-estimé mais aussi un coup de jeune à l’approche qui entoure les objets traditionnels. Ainsi, à la rigueur pourrait-on dire archéologique de la vision européenne de ces pièces se substitue une démarche renouvelée intégrant une expérience philosophique mais aussi une Histoire vivante et en devenir.

 

Vous pouvez encore profiter de cette exposition jusqu’au 6 octobre 2019.
Palais des Beaux Arts
Rue Ravenstein 23
1000 Bruxelles
www.bozar.be

Tribal Art Oostende : exposition d'art africain en Belgique

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De l’art tribal africain à la côte belge : un projet collaboratif

Au travers de ce billet de blog nous vous proposons une petite synthèse de l’exposition d’art tribal africain Tribal Art Oostende qui se tient en ce moment, sans surprise, à Ostende, l’une des principales villes touristiques belges.

C’est au cœur de la ville, dans la Galerie Papillon située à deux pas du casino qu’L&Z Arts a posé ses valises pour quelques semaines.
Nous tenons à remercier le propriétaire des lieux, Jacques Lanoye qui a accueilli chaleureusement notre projet collaboratif ainsi que le Musée International du Masque dont la direction, Clémence Mathieu et Giuseppe Di Stazio, ainsi que ses artisans, Olivier Desart et son équipe accompagné de Benoît Gineste, ont œuvré avec dynamisme et initiative dans la mise en place de la première édition de cet événement dont on peut d’ores et déjà conclure qu’il est une réussite compte tenu de l’affluence des visiteurs, simples curieux ou collectionneurs invétérés.

Assemblage des supports conçus et réalisés par l’équipe du musée

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Galeristes, collectionneurs, Musée : les participants

Au programme, des masques, statues et autres objets sélectionnés avec soin par le commissaire de l’exposition, Dimitri André, historien africaniste, expert en arts premiers africains.
Cet ensemble d’objets africains provient donc pour partie des réserves du musée que nous vous proposions de découvrir par un autre article précédemment, et d’autre part, de collections privées et de marchands.

Par ce choix de pièces, M. André a souhaité faire découvrir au public autant que possible la richesse des styles et des ethnies répartis dans l’immensité du continent africain et ce au travers d’objets authentiques de haute qualité, parfois dotés de pedigrees impressionnants. Pour n’en citer que quelques uns, un masque Wongo Pende, ex Dartevelle, ex Scheller ; un remarquable Waja Yoke Mumuye ex Merton Simpson, USA, un réceptacle Ile Ori Yoruba ex Guisson, ainsi que la pièce phare de l’exposition, l’incontournable figurine féminine Kongo.

Ont également mis du cœur à l’ouvrage dans la réussite de l’événement, Jean-Marie Delers et Vincent Kleinekorte à titre particulier mais non moins passionnés par l’art tribal depuis des années.
Le visiteur retrouvera somme toute des pièces provenant d’un spécialiste du Mali et plus spécifiquement de l’art Dogon, Jan Baptist Bedaux, anciennement professeur d’histoire de l’art à l’université d’Amsterdam ; d’un spécialiste incontournable dans les arts du Cameroun, Martial Bronsin ; de Jos Humblet spécialisé en objets du Nigéria, ainsi que des pièces prêtées par Johan Baudart, artiste belge contemporain ; et enfin de nombreuses pièces présentes sur le catalogue du site L&Z Arts ainsi que des objets exclusifs, le tout encerclé par les toiles du peintre bruxellois Pierre Thoma.

Ci-dessous, découvrez l’exposition et le vernissage en images. Pour la visiter, vous avez jusqu’au samedi 11 mai inclus.
Adresse : Galerie Papillon, Madridstraat 2, Oostende.

Tribal Art Magazine - Exposition “Masques” du quai Branly - “Masques du monde” MUM - MusAfrica Namur

MASQUES : des joyaux du musée du quai Branly - Jacques Chirac exposés à la Cité Miroir à Liège

Administrateur Administrateur

Des masques africains… entre autres

Faisant suite à Barheïn, Pékin et Tokyo, Liège accueille cette année à la Cité Miroir l’exposition MASQUES du musée quai Branly - Jacques Chirac, composée de plus de 80 masques issus des cinq coins du monde.
L&Z Arts vous livre un petit compte-rendu des trésors que vous pourrez y découvrir jusqu’au 20 juillet.

C’est au cœur de la remarquable structure des anciens Bains et Thermes de la Sauvenière à Liège qu’est venue s’installer l’exposition itinérante MASQUES mise sur pieds par le quai Branly. Dans un espace clos, à la lumière tamisée préservant l’intégrité des œuvres parfois vieilles de deux siècles, le visiteur est encerclé par des rondeaux de masques répartis selon les régions. Une ambiance sonore accompagne ces objets rituels en vue de les contextualiser.

De l’universalité du masque

Une exposition comme celle-ci permet au visiteur, novice ou expert, de (re)découvrir la richesse et les variations stylistiques du masque à travers le monde, mais elle offre aussi à tout un chacun l’opportunité d’une étude comparative sur l’usage et la signification du masque selon les cultures et, dirais-je même, à l’intérieur de chaque culture, selon les groupes ethniques où les rites peuvent fortement varier sur de petites distances. Si l’on peut facilement identifier de grandes différences de styles et d’usages, force est de constater néanmoins que, malgré les distances, l’Homme reste Homme, et partout, son espace civilisé traditionnel s’oppose au monde sauvage habité par les esprits. Dès lors, certaines thématiques transcendent les océans et les continents pour se traduire de façon remarquablement similaire dans deux villages séparés par des milliers de kilomètres.

Comme le disait Samuël Glotz (fondateur du Musée du masque, Binche), on ne peut qu’être frappés par l’extension spatiale et diachronique du masque : toute l’humanité porte ou a porté le masque. Cet accessoire sans destination utile est plus répandu que l’arc ou la charrue. Si des civilisations ont prospéré tout en ignorant des objets élémentaires tels que la roue, elles connaissent le masque.
Cette universalité dans l’espace se double d’une autre universalité dans le temps. Le masque apparaît en effet dans les peintures rupestres du paléolithique, à l’aube de l’humanité, pour être finalement encore porté de nos jours un peu partout dans le monde.

Il n’est pas d’outil, d’invention, de croyance, de coutume ou d’institution qui fasse l’unité de l’humanité, du moins qui la fasse au même degré que le port du masque ne l’accomplit et ne la manifeste.
— Roger Caillois, Les Jeux et les Hommes, 1958

Dans beaucoup de peuples à la civilisation traditionnelle, dont le mode de vie n’a pas encore ruiné les coutumes, ce caractère rituel est très manifeste. Afrique, Océanie, Asie, Amériques ; agriculture, justice, initiation, funérailles,… nombreux sont les occasions et lieux d’apparition du masque.

Le masque en Afrique

Masques de course Dan (Côte d’Ivoire) au faciès concave et aux grands yeux béants, masque de justice Kifwebe Songye (R. D. Congo) de la confrérie Bukushi, masque de rituel agraire représentant l’antilope Ci Wara, etc, autant d’objets aux formes et usages extrêmement variés.
Notons aussi la présence d’un masque casque Sowo (ou Nowo) des Mende en Sierra Leone, porté exclusivement par les femmes de la confrérie féminine du Sande ou Bundu, un cas unique en Afrique subsaharienne. La sélection de masques africains témoigne somme toute de l’extrême diversité des formes qui se manifeste dans l’art de sculpter des masques.
Médiateur, le masque intervient pour rétablir le lien rompu entre l’univers indompté de la forêt et l’espace humanisé du village. Il souligne aussi le passage de l’état de non-initié à celui d’initié.

Le masque africain est une passerelle métaphorique qui relie nature et culture.

Peut-être davantage qu’ailleurs, une dimension de mystère entoure les masques sur le continent africain. En raison de l’étrangeté de leurs formes et de leurs dimensions parfois imposantes, les masques font forte impression. Cette part de mystère s’illustre également dans le fait que, si les hommes disposent du bagage initiatique suffisant pour appréhender le sens profond des danses masquées, pour les femmes et les enfants, la méconnaissance de la préparation rituelle renforce encore cette notion d’apparition sacrée.

Le masque en Asie

Avant d’être repris par le théâtre et la danse, la fonction de ces masques dont la plupart, à l’origine au moins, étaient liés à des rituels religieux, est de montrer sous leur aspect visible des êtres surnaturels divinités, démons, animaux fantastiques. Des sujets pas si éloignés des représentations d’autres continents donc. Et comme les statues dans les temples, ils sont des objets sacrés car en eux repose la puissance des esprits qu’ils représentent. Le visiteur pourra observer des pièces provenant du Japon et de Chine mais aussi de pays plus discrets tels que le Nepal, le Vietnam, le Sri Lanka.

Le masque en Océanie

Les masques d’Océanie apparaissent lors des cérémonies dédiées aux morts et aux ancêtres fondateurs du clan. Ils sont aussi destinés à accompagner les rituels d’initiation des adolescents ou encore à invoquer les esprits de la nature et de la fertilité.
Les peuples d’Océanie puisent dans la nature les éléments qui composent leurs masques aussi beaux qu’inquiétants. Selon leur conception du monde, un même fluide vital anime les hommes, les animaux et les végétaux, ainsi étroitement liés les uns aux autres, comme des frères. Leurs masques ont de petites faces attendrissantes, placées sur les plus beaux ignames (sorte de grosse racine comestible) ou des yeux démesurés, des nez crochus, des formes extravagantes et, grâce à de hautes armatures, atteignent parfois plusieurs mètres de haut…
Indonésie, Papouasie, Malaisie, Mélanésie, Micronésie : une immense région composée de dizaines de milliers d’îles à la fois isolées et liées culturellement qui ont décliné leurs propres conceptions artistiques.

Le masque dans les Amériques

On aborde ici les masques d’Amériques centrale et latine ainsi que ceux des grandes contrées septentrionales du Nord du Pacifique et du Grand Nord, depuis l’Alaska jusqu’au Groenland, autour du thème de la parodie.
Dans le Nord, le masque, support de rêve et auxiliaire du shaman, joue un rôle catalyseur. Son apparition vise à dédramatiser l’autorité intimidante du shaman et l’intervention du sacré.
Plus au sud, dans les mascarades et carnavals, les fonctions de mime et de parodie du masque se prolongent dans la diablada bolivienne ou les masques tzotzil du Chiapas. Cette conception s’inscrit dans une démarche syncrétique, où traditions européennes et réminiscences de fêtes indiennes masquées se combinent pour réinterpréter cycliquement des événements historiques ou des faits marquants de la vie sociale.

C’est toujours avec un grand plaisir que nous partageons avec vous, par le biais de ce blog, nos visites. Je ne peux donc que vous encourager à vous rendre sur place pour découvrir et profiter pleinement de cette sélection d’œuvres.
Envie de prolonger cette expérience émotionnelle et culturelle ?
Rendez-vous à la côte belge pour la première exposition d’art tribal organisée par L&Z Arts à Ostende.
Venez vous émerveiller de pièces authentiques et nous rencontrer lors du vernissage :

Sainsbury African Galleries au British Museum : Noël dans l'art africain au coeur de Londres

Etienne Z

Superbe perspective nocturne de la ville de Londres, en particulier Tower Bridge depuis le sommet du Shard

L’art tribal africain au British Museum, Londres

Dans la continuité de nos visites au Musée africain de Namur et au Musée International du Masque de Binche, je faisais, à l’occasion de Noël, une petite visite du fameux British Museum de Londres pour notre Galerie L&Z Arts. De quoi vous ramener quelques images et un récapitulatif de ce qu’on trouve au sous-sol, plus précisément dans la galerie Sainsbury dédiée à l’art tribal africain dans laquelle le visiteur, en l’occurence moi, sera émerveillé par la vie culturelle d’Afrique, à la fois passée et présente.
On y trouve de nombreuses pièces d’art primitif provenant de divers groupes ethniques à travers le continent au cours des siècles : des objets du quotidien comme des pièces d’exception.
Le British Museum possède pas moins de 73 000 objets d’art premier africain (statues, masques, bronzes et céramiques confondues) dont une infime partie seulement est exposée. En regard de ces objets d’intérêts ethnographique et historique, on découvre aussi les travaux d’artistes contemporains renommés inspirés par l’art primitif africain.

L’entrée de la galerie d’art africain “Sainsbury”.

Figures des Luba, Dogon, Baoulé,…

La première salle nous plonge immédiatement dans le coeur du sujet ; les amoureux du Congo en seront ravis puisqu’on y observe des pièces Luba comme ce fameux siège à caryatide dans le style du Maître de Buli, si expressif, trônant à côté d’une statue féminine à la patine noire encore suintante d’huile. On notera la présence de pièces plus petites telles que des appuie-nuques figuratifs d’une finesse remarquable dont les personnages caryatidiques arborent la coiffe si particulière du(es) maître(s) de la coiffure en cascade.
À proximité, une modeste figure aux bras levés et à l’épaisse patine croûteuse datant du 14ème siècle représentant probablement un nommo (ancêtre mythologique) attribuée par les Dogon à un peuple les ayant précédés dans la région des falaises de Bandiagara au Mali : les Tellem. Ces pièces ancestrales bien souvent sorties de leur contexte ont rendu leur étude difficile. Elles sont néanmoins attribuées au culte de la pluie ou étaient inhumées avec leur propriétaire. Enfin, discrètement perchée sur son socle, une magnifique statue féminine Bambara dont le tronc est couvert de scarifications, apparemment liée au culte des ancêtres et à la fécondité.

Des couteaux en fer aux pots en terre

D’autres pièces viennent compléter cette sélection, dont deux statues royales des Kuba-Bushoong de type Ndop, l’une dans la première salle et l’autre dans la seconde. Pour rappel, les rois Kuba étaient parfois commémorés au travers de figures qui, bien que n’étant pas à proprement parler des portraits, présentaient des caractéristiques et éléments spécifiques au roi qu’elles représentaient et devaient par ailleurs contenir leur esprit.
Dans cette seconde salle, on découvre également une riche collection de “couteaux de jet” aux formes plus complexes les unes que les autres ainsi qu’un ensemble de boucliers. Le terme “couteaux de jet” fût inventé par les ethnologues afin de classer une large gamme d’objets ne pouvant être décrits comme des haches, des lances ou des épées et dont certains étaient destinés à être lancés. On retrouve ces fameux couteaux dans une vaste région de l’Afrique, des plaines du Sahara jusqu’aux denses forêts bordant le fleuve Congo.
Dans la suite logique, quelques outils de forgeron sont exposés. Mais n’oublions pas de mentionner les figures colorées igbo ainsi que plusieurs figures de reliquaires Kota, dont une janiforme.
Un grand espace est également dédié à la poterie et aux céramiques, parfois antiques, qui servaient des desseins tantôt usuels, tantôt rituels mais témoignent toutes d’une maîtrise technique et d’un souci stylistique évidents.

Quelques masques africains de plus

Avant d’atteindre le clou du spectacle, à savoir la dernière salle, on s’arrêtera quelques instants pour jeter un oeil attentif à une sélection de masques dont l’imposant Nimba des Baga, présenté ici avec son épaisse coiffe de raphia ; ainsi qu’à des masques striés du culte Kifwebe des Songye dont un exemplaire à l’allure tout à fait particulière, bien loin des canons stylistiques habituellement rencontrés. Un Mbap mteng est aussi exposé, long masque couvert de coquillages représentant l’éléphant chez les peuplades du Grassland au Cameroun.
Quelques pièces en ivoire viennent compléter la longue vitrine : des statuettes Lega liées au culte du Bwami, et des masquettes-amulettes protectrices Ikhokhoo des Pende portées autour du cou par les garçons nouvellement initiés et représentant les masques qu’ils seront destinés à porter ultérieurement.
Notons enfin la présence d’autres masques des groupes Dan, Bron, Senoufo, Mende,… Une imposante porte Yoruba décorée de nombreux personnages colorés ainsi qu’un panneau ancestral Kalabari sont exposés sur les murs.

L’exceptionnelle collection de bronzes et ivoires du royaume de Bénin

La dernière salle nous ouvre les portes du royaume de Bénin au travers d’une collection unique de diverses pièces en bronze, ivoire et corail : plaques figuratives, têtes, masques, cavaliers, léopards etc sont au rendez-vous.

L’un des quatre masques pectoraux. Ivoire, fer, cuivre. H. 22.5cm

La collection de pièces du Bénin présente au British Museum est l’une des plus célèbres au monde. On peut la subdiviser en deux groupes distincts : d’une part les ivoires et bronzes du palais royal façonnés par les artistes de la cour comme objets régaliens. D’autre part, les objets en ivoire taillés expressément comme objets souvenirs destinés aux premiers Européens à être entrés en contact avec l’Afrique de l’ouest.
Selon N. MacGregor, directeur du musée, les bronzes de Bénin ont toujours eu une portée politique, exprimant initialement l’hégémonie et la domination de la royauté sur le monde extérieur.
Alors que les pièces en bronze exposées ont été acquises par le British Museum de différentes manières au fil du temps (dons, legs, achats), toutes proviennent, à l’origine, de la mise à sac du palais royal par l’expédition punitive lancée par les forces britanniques en 1897 à la suite du massacre d’une délégation diplomatique la même année.
Indépendamment de la question très actuelle de la légitimité et du rapatriement des pièces acquises, je vous invite à découvrir ces pièces en gardant à l’esprit la richesse culturelle et historique qu’elles représentent.

Ci-dessous, les plaques du palais, chacune étant unique, figurant tantôt des soldats, des dignitaires ou des colons portugais armés de leur fusil. Ces plaques ornaient les piliers du palais. Chaque détail a fait, et fait encore de nos jours, l’objet d’études approfondies. Ces pièces inestimables d’un point de vue artistique constituent également de fabuleux témoignages historiques.
Les représentations de cavaliers sont quand à elles connues pour avoir été exposées sur des autels royaux. Les connaissances actuelles à leur sujet laissent encore cependant une bonne place au doute quant à leur identification. Les avis divergent donc sur leur signification.
Les forgerons edo ont fait la part belle aux représentations de léopard, qu’il s’agisse de masques ou de figures complètes, animal mythologique dans l’histoire du royaume, ainsi qu’aux têtes coulées à l’effigie de rois et de reines et à d’autres objets tels que les épées cérémonielles eben.

Art traditionnel et art contemporain

Revenons, pour terminer, sur l’aspect scénographique du British Museum. Si l’on peut regretter la mise en valeur — et surtout l’éclairage ! — relativement pauvre des objets exposés qui ne m’a définitivement pas aidé dans ce reportage photographique, on notera que des espaces ont été dédiés d’une part à des artistes africains contemporains ainsi qu’à des oeuvres inspirées par l’art tribal.
Ainsi, une toile à l’allure warholienne de l’artiste du Botswana Ann Gollifer, dans laquelle Marylin Monroe est remplacée par une déclinaison d’un masque Lipiko Makonde, orne la cage d’escaliers menant à la galerie Sainsbury. À l’intérieur, plusieurs oeuvre contemporaines occupent l’espace : “Tree of life” — assemblage de pièces d’armes à feu — ; “Les femmes Peul”, fétiche élancé par l’artiste Gérard Quenum sur les thèmes de la maternité et de la guerre ; et enfin, un thème que je vous invite à explorer plus en profondeur au Musée de Binche : les mascarades africaines au Carnaval avec les figures Moko Jumbie de l’artiste britanico-trinidadien Zak Ové.

Galerie L&Z Arts partenaire du Musée International du Carnaval et du Masque de Binche

Etienne Z

Quel meilleur lieu pour accueillir le Musée International du Carnaval et du Masque que le centre de la ville de Binche dont le carnaval vieux de plus de six siècles a été élevé au rang de patrimoine culturel et immatériel de l'humanité par l'UNESCO ?
Passons cette question rhétorique et découvrez notre visite exclusive de ce lieu au sein duquel vous voyagerez parmi les traditions masquées du monde entier.

Le musée est installé dans ce qui était au départ l'ostel du comte de Lalaing dont la première mention date de 1570, un lieu d'intérêt donc, qui a traversé les siècles et a accueilli diverses institutions avant d'être classé en 1965 par la Commission royale des Monuments et des Sites. C'est en 1975 que Samuel Glotz inaugure le musée qui n'a cessé de se réinventer et dont les collections atteignent désormais les 10 000 pièces (masques, tenues, instruments, marionnettes et autres objets connexes confondus). Stéphane et moi avons été aimablement reçus par la directrice actuelle, Mme Clémence Mathieu qui nous a fait visiter la partie publique mais également le Saint des saints du musée : la réserve où dorment les pièces attendant patiemment d'être exposées.

Des masques revisités et des fétiches

Concrètement, le rez-de-chaussée accueille les expositions temporaires à thème mettant à l'honneur des artistes et des structures partenaires. Lors de notre visite, on pouvait, en autres, observer une ré-interprétation de masques phares de l'art africain — Songye, Lega, Pende — créée par l'artiste plasticien Jean-Marc De Pelsemaeker dont le support de développement de l'écriture picturale emprunte souvent des thèmes trouvés dans l'histoire de l'art, la religion, la vie quotidienne. Des masques africains récents sont ici couverts d'une couche de peinture phosphorescente complétée d'une calligraphie personnelle chargée d'images et de symboles.

La suite du niveau est actuellement attribuée à l'exposition "Guérir - Ensorceler" faisant découvrir au visiteur les objets et cultes magiques en lien avec le fétichisme. Ce dernier traîne une réputation négative dans l'imaginaire collectif. À une salle aux couleurs noir et rouge accueillant des objets et mises en scène liés à des rituels maléfiques, succède une salle claire et chaleureuse où sont exposés des objets divinatoires et apotropaïques, la face généralement méconnue du fétichisme tribal.
Fétiche à clous Nkisi Nkonde, accordéon Pende Galukoji, objets vaudou Bizango, panier de chaman Chepang, masques, poupées et hochets, autant d'objets issus de différents continents qui répondent à des besoins mystiques et superstitions dans la vie des communautés. Exposition prolongée jusqu'au 23 septembre 2018, vous avez donc encore quelques jours pour en profiter.

Les masques des 5 coins du monde

L'étage supérieur se subdivise quant à lui en plusieurs parties distinctes. On y trouve l'exposition permanente de masques africains, océaniens, américains, asiatiques et européens ainsi qu'une partie spécialement dédiée au carnaval de Binche, aile actuellement en cours de refonte intégrale pour accueillir, à terme, une scénographie interactive et innovante.
Un espace est réservé à l'expo temporaire des mascarades d'une région spécifique, "Au royaume des touloulous, Carnaval de Cayenne" lors de notre visite. Dans ce cadre, le musée concrétise sa volonté de proposer une muséographie moderne et originale en réintégrant les masques à leur contexte rituel afin d'optimiser l'impact muséal de l'exposition sur le visiteur.
En effet, comme en parle Marc Coulibaly dans son ouvrage Des masques cultuels au masque muséifié, la mise en scène muséographique des masques a tendance à les figer dans la mesure où seule la forme plastique est mise en valeur par une scénographie elle-même devenue un art, ce qui a pour conséquence de faire fi du contexte du masque et de son usage.
Pour offrir une expérience contextualisée, le musée a utilisé diverses techniques scénographiques dont deux installations audiovisuelles : l'une place le spectateur au centre de plusieurs écrans de projection où il observera des films illustrant les danses masquées. Dans l'autre salle, le visiteur devient auditeur ; il est plongé dans un espace confiné au cœur de l'ambiance sonore qui accompagne ces festivités. Deux installations créées par Laure Chatrefou et Anne Guillou.
Ensuite, une large variété de masques est exposée tantôt sur socles, tantôt en vitrine, classés selon qu'ils proviennent de tel ou tel continent. Le visiteur pourra constater, malgré la richesse des formes, des motifs et des significations, que certains éléments sont récurrents en dépit des distances, voire d'un continent à l'autre. Ces patterns de traits communs concernent les thématiques abordées mais aussi les formes, les matériaux et les techniques employés. 
Une opportunité d'étude comparative qui illustre bien les propos de M. Mead en 1970 : "En illustrant les différences culturelles de chaque groupe humain et en soulignant les contributions qu'ils font à la société, les musées peuvent aider les gens à mieux se situer dans leur humanité commune."
Le visiteur appréciera par ailleurs les descriptifs concis qui accompagnent les pièces. Il est bon de noter que le musée considère le masque dans sa globalité et pas seulement au sens facial où l'on a tendance à l'entendre. Ainsi, autant que possible, les tenues intégrales sont présentées, ce qui, en plus d'un souci évident de fidélité à la réalité, permet au visiteur de prendre la pleine mesure de ces costumes rituels et participe une nouvelle fois à la contextualisation des pièces.

Ces tenues parfois composées de fibres végétales ou d'autres matériaux fragiles sont stockées dans des conditions d'hygrométrie adaptées afin d'en assurer une conservation optimale. C'est au sous-sol que Stéphane et moi avons pu découvrir la réserve où sont entreposés des milliers de pièces dont l'inventaire est en cours : la caverne d'Alibaba pour tout collectionneur d'art primitif, pas seulement africain, et une opportunité exclusive pour L&Z Arts.
Qui dit acquisition de biens culturels originaires de pays éloignés pose une question éthique. Mme Mathieu témoigne de la sensibilité du musée à ce sujet qui veille à la qualité de ses sources en étant fourni depuis longtemps par des ethnographes et chercheurs présents sur le terrain.

Musée International - Public local

On l'a vu, le Musée du masque de Binche est un formidable outil doté de pièces aussi nombreuses que variées et mu par une volonté de modernité et d'interactivité : des animations y sont régulièrement organisées comme par exemple une reconstitution de mascarade des touloulous de Cayenne en lien avec l'exposition, évènement qui pourrait suggérer, un jour ou l'autre, la reconstitution de danses ethniques africaines ?
Actuellement, le public est constitué de nombreuses écoles qui représentent à elles seules la moitié des visites annuelles. Ce lieu du patrimoine wallon mérite à nos yeux l'intérêt d'un plus vaste public, sentiment partagé par la directrice Mme Mathieu qui souhaite attirer davantage de visiteurs à une échelle plus grande. C'est avec plaisir et honneur que Stéphane et moi par le biais d'L&Z Arts apporterons notre aide au développement et à la promotion du MUM afin de faire connaître ce petit joyau hainuyer à nos amis collectionneurs en Belgique et à l'étranger.

Pour visiter ce lieu : Rue Saint-Moustier 10, 7130 Binche, Belgique

Visite au Musée Africain de Namur

Etienne Z

Divers masques africains. Pende, Yaka, Suku, Ngeendé, Luba, Kongo, Chokwe : autant d'ethnies représentées.

Un bref historique

Pour présenter le Musée Africain de Namur, un petit retour en arrière s'impose. On remonte à l'impulsion coloniale lancée par Léopold II pour l'ouverture de voies destinées à permettre l'accès au plus profond du continent africain, et en particulier du Congo.
Cet appel à l'exploration a suscité l'intérêt de pas mal de personnes dont des Namurois. Tous n'en revinrent pas indemnes voire pas du tout, et les survivants se rassemblèrent pour former une association sous le nom de "société d'études et d'intérêts coloniaux".
Au fil des années et toujours dans l'optique de faire découvrir l'Afrique et plus particulièrement le Congo à tout un chacun, l'idée de la création d'un musée germa pour se concrétiser en 1912.
La structure changea plusieurs fois de nom dans les décennies qui suivirent et l'implantation du musée fut plusieurs fois déplacée pour finalement se fixer dans la caserne Léopold (dite des lanciers) dans le centre de Namur.
Progressivement, les collections du musée se sont enrichies grâce à des dons à la fois de la famille royale, de pères missionnaires, de personnalités militaires, d'anciens coloniaux ainsi que grâce à des mécènes.

Des masques africains mais pas seulement

La première salle du musée permet de se plonger à la fin du XVIIIème siècle. À renfort de cartes de l'Afrique établies au fur et à mesure des années, on observe le découpage des territoires et l'exploration progressive des contrées jusqu'alors vierges de toute colonisation occidentale. En parallèle sont présentés les portraits, journaux de bord, carnets et historiques des diverses expéditions effectuées par de grands noms comme Stanley, Vrithoff, Ramaeckers,...
Une introduction historique bien utile à la compréhension des liens qui nous unissent encore aujourd'hui au Congo.

Dans les salles qui suivent, le visiteur découvrira bien sûr des objets ethniques comme des masques, des statues, des bronzes et divers objets usuels (instruments de musique, vanneries,...). Sur les murs est exposée une impressionnante collection de couteaux de prestige, de lances et d'arcs d'une rare variété ayant appartenu à Josué Henry de la Lindi, une bonne centaine de pièces dont ses descendants ont aimablement fait don au musée. Une collection qui ravira sans aucun doute tout amateur d'armes tribales authentiques.
Sanza, tambours à fente et divers oliphants en ivoire et os sont aussi présentés.
Plusieurs vitrines permettent quant à elles de faire découvrir au visiteur la variété des masques africains congolais à travers plusieurs pièces emblématiques comme les masques de guerrier Salampasu, les masques Pende (Mbangu, Mbuya,...), Chokwe, Suku et Yaka,... De petites figurines Kongo, Chokwe et bien d'autres encore sont visibles. Si des étiquettes sont présentes pour identifier les pièces, on regrettera l'absence de catalogue du musée offrant un complément d'information pour toutes les pièces présentées. Des visites guidées didactiques sont cependant proposées par le directeur-conservateur M. François Poncelet qui parvient à capter et maintenir l'attention du public sur tous les aspects qu'il développe, ni trop ni trop peu, tout en chassant les idées reçues sur l'art primitif. J'en veux pour exemple la petite anecdote concernant l'un des masques Chokwe n'ayant aucun lien avec une quelconque initiation mais simplement sculpté pour se moquer de l'apparence des colons blancs et de leur prétention.
M. Poncelet démontre par là que les objets d'art africain n'ont pas nécessairement une portée rituelle mais participent à une forme d'expression et de communication des individus.

Une réflexion contemporaine

Une volonté de réflexion sur ce passé délicat
— F. Poncelet, conservateur-directeur

L'ombre de Léopold II sur le Congo, une belle métaphore.

Si la seconde salle comporte un buste de Léopold II triomphant, la triste réalité a rattrapé la réputation de ce personnage — auparavant présenté comme héros — à cause des exactions commises par son administration dans le cadre du pillage des richesses naturelles et l'exploitation systématique des tribus locales. 
On appréciera que le musée ait choisi d'assumer pleinement cet héritage avec ses bons et ses mauvais aspects, et présente plutôt une volonté de réflexion sur ce passé délicat. La démarche va plus loin puisque c'est selon cette réflexion que le directeur choisit de faire découvrir au public la salle dédiée aux richesses naturelles du Congo avec un accent tout particulier mis sur les richesses géologiques et minerais précieux pillés de longue date par l'Union minière puis indirectement par les multinationales peu scrupuleuses par l'entremise de groupes armés.

Ainsi, M. Poncelet fait ou refait la lumière sur le lien étroit entre les gadgets high-tech de notre vie quotidienne et les problèmes humanitaires qui en découlent dans ces lointaines contrées. On notera la présence de "croisettes du Katanga" à la fois objets rituels et monnaies de cuivre.
On le voit jusque là, le musée n'a pas pour vocation d'être focalisé sur l'art africain. Une belle superficie est d'ailleurs réservées à la nature et à l'énorme biodiversité vivant dans ce pays aux régions tantôt planes, clairsemées et sèches, tantôt montagneuses, boisées et humides. De nombreux spécimens de toutes sortes forment un petit musée des sciences naturelles du Congo.

"Croisettes du Katanga"

Le Musée Africain de Namur ne doit donc pas être envisagé comme un musée d'art ou d'ethnographie au risque de décevoir, mais plutôt comme un lieu de mémoire retraçant depuis les débuts de la colonisation jusqu'à nos jours le lien qui nous unit au Congo. Les objets ethniques sont néanmoins présents et conservent un intérêt pédagogique, tout comme le reste du musée.
Pour visiter ce lieu : Rue du 1er Lanciers 1, 5000 Namur, Belgique.
https://musafrica.net/

Un week-end au Bourgogne Tribal Show édition 2018

Etienne Z

Le Bourgogne Tribal Show 2018, comme ses deux éditions précédentes d'ailleurs, se déroulait il y a juste une semaine à Besanceuil, près de Cluny. Je décrirais cet évènement comme l'occasion pour les collectionneurs confirmés, comme pour les néophytes, d'entrevoir et de s'immerger dans la richesse culturelle et esthétique des peuplades dites primitives le tout dans un cadre champêtre, et au soleil en l'occurrence. 
Lancée il y a de cela trois ans par des passionnés et le propriétaire des lieux M. Bruno Mory, l'initiative a été couronnée de succès et s'est agrandie pour recevoir, cette année, pas moins de vingt galeristes de renom originellement situés à Paris, Bruxelles mais aussi en province et à l'étranger, coordonnées par Mme Julie Arnoux.
Le lieu tout d'abord, en contrebas d'un château médiéval et d'une église de la 1ère moitié du XIè siècle, est fort d'un superbe panorama sur la campagne vallonnée du Charollais. Ses grandes étendues de pelouse ne servent pas seulement d'aires de détentes pour les visiteurs mais constituent des espaces de présentation d'oeuvres parfois volumineuses telles des réalisations en acier corten ou en pierre.

L'intérieur des locaux n'était pas en reste puisque le visiteur pouvait observer de nombreuses toiles présentées sur les murs tout au long de sa visite. Les pièces d'art primitif cohabitaient en effet avec de nombreuses oeuvres d'art aborigène à l'allure très contemporaine telles les remarquables tableaux de Jiratchaya Pripwai, jeune artiste thaïlandaise dont les grandes oeuvres minimalistes (et dieu sait à quel point ce type de visuel me passionne) sublimaient en particulier d'antiques sculptures Khmer exceptionnellement raffinées issues de la galerie Woerner (Hong Kong), mais s'harmonisaient également sans peine avec des pièces africaines plus brutes des galeries Schlag et Pecci.

Si beaucoup de groupes ethniques africains étaient représentés, on notera que nombreuses étaient les pièces issues de la Côte d'Ivoire et du Mali. Tendance générale ou choix stratégique des marchands de s'adapter au public majoritairement français de l'évènement, tout amateur ou collectionneur aguerri aura néanmoins pu se régaler les yeux et les mains de ces superbes pièces car, comme nous le confirmait Alain Lecomte à Stéphane et moi lors d'une rencontre antérieure, l'art primitif chargé de son usage s'appréhende tout autant par le toucher que par la vue. 

Si ce salon était l'occasion de se plonger dans de jolies pièces d'art africain, océanien et, dans une moindre mesure inuit, il a surtout été l'opportunité de tisser des liens avec quelques personnes avec lesquelles notre petite mais jeune et dynamique structure n'avait encore pu discuter que par le web. Ainsi, les passionnés regroupés dans l'association des Amis des Cultures et des Arts Premiers rassemblés autour du Musée Africain de Lyon. Fermé pour travaux à l'instar de notre musée de Tervuren, ses Amis ont participé à son renouveau sous une forme plus actuelle, didactique et interactive afin de non seulement participer à la diffusion de l'art primitif, mais aussi de transmettre les connaissances davantage ethnographiques relatives au monde tribal, dans la continuité du souffle donné par le père Robert à partir de 1979, et ce au travers de conférences, d'expos temporaires et de voyages organisés.

Ce petit festival était enfin rendu cosy par la présence de musiciens apportant une atmosphère estivale et apaisante en accompagnement des menus, et surtout des boissons locales, proposées à des prix démocratiques. En somme, une rencontre mêlant détente et passion dans un lieu un peu hors du temps.
Cette édition 2018 clôturée, une nouvelle opportunité se présente à vous, cher(es) lecteurs/lectrices : la plus classique Bruneaf se tiendra au coeur du quartier du Sablon à Bruxelles du 6 au 10 juin. Nous serons de passage, espérons vous y croiser et vous invitons par ailleurs à nous rendre visite en nos locaux afin de découvrir en exclusivité une foule de trésors encore non publiés sur notre site. Situés à moins d'une heure de route de Bruxelles, nos collections valent le détour.