Art Africain
Statuette Teke
Statuette Teke
Statuette magico-religieuse, Teke, République du Congo, plateau de Mbé
Provenance : collection privée majeure d’art Teke, France
Datation estimée : fin XIXe - début XXe siècle
Hauteur : 19,5 cm
Matériaux : bois, substances magiques
Dans les aires culturelles d'influence bantou, le terme nganga est souvent employé et recouvre des fonctions diversifiées parmi lesquelles thérapeute, devin, prêtre, sorcier, etc. Le traitement des maladies fait partie des attributions principales des nganga chez Teke. Les figurines magico-religieuses interviennent régulièrement dans le cadre des techniques thérapeutiques. Le nganga fait souvent payer fort cher ses services, qui comprennent la fabrication des kiteki na matompa, soumis à des rites complexes se déroulant généralement sur plusieurs semaines. Sang animal, plantes spécifiques et argile constituent les matières vives du bilongo que l'on applique sur le corps de la figurine. Le reliquaire est obturé à l'aide d'étoffe ou de peau solidement maintenue par des cordelettes au niveau du cou et du ventre laissant les jambes visibles.
Comme le confirment les études comparatives menées précédemment, on voit que le sommet de la tête ainsi que l'abdomen ont fait l'objet d'apports de substances magiques. Ces parties de corps sont en effet considérées comme des vitales. Les substances "magiques" constituent les principales composantes des objets de pouvoir. Il arrive, comme on le voit ici, que des figures Teke très ravinées aient perdu leur bilongo ; désormais leur secret n'est plus préservé. Ceci est dû non au hasard mais à la volonté d'une effraction qui laisse béant le creux de l'abdomen. Il est fréquent que le propriétaire d'une statuette racle un bilongo ayant prouvé son efficacité. La poussière ou des fragments sont alors utilisés comme médicaments, pour l’usage personnel du propriétaire ou pour d'autres personnes. Cet acte de "désacralisation" laisse des traces sur les œuvres : présence de simples orifices dans lesquels étaient insérés quelques éléments, ou profondes cavités ayant abrité une charge volumineuse.
Rares sont les domaines de la vie pour lesquels les Teke ne font pas appel à la protection d'objets. Ainsi, au moment de l'accouchement, le nganga présent prépare les médicaments dans la composition desquels entrent la poussière de bilongo destinée à réduire les maux dus à l'enfantement. Du placenta sera aussi mélangé au bilongo d'une statuette qui accompagnera l'enfant pour de nombreuses années.
D'une point de vue iconographique, les sculptures illustrent une variété de styles traduisant l'existence d'artistes de cultures différentes. Les Teke constituent d'ailleurs l'un des plus importants groupes ethniques du Congo, se subdivisant en sous-groupes dont les Lali, Lari, Mfinu, Sundi, Tsaye. Toutefois, les sculpteurs semblent respecter un ensemble de conventions menant à une composition structurée de façon constante. Le port de la barbe constituerait le signe d'un statut privilégié tandis que les scarifications traduisent soit l'origine du groupe pour lequel la statuette a été sculptée soit l'appartenance.
Statuette Teke expertisée par Raoul Lehuard
Le propriétaire précédent de cette figurine africaine l’a fait examiner par M. Raoul Lehuard. Le document qu’il a rédigé, visible ci-dessous, sera fourni.
Raoul Lehuard, père fondateur du célèbre périodique “Arts d’Afrique Noire” édité de 1971 à 2004 fait figure de grand spécialiste des arts Bateke, Bakongo et Babembe en particulier. Il est également l’auteur de nombreux ouvrages de référence parmi lesquels “La statuaire du Stanley Pool : contributions à l'étude des arts et techniques des peuples Teke, Lari, Bembe, Sundi et Bwende de la République Populaire du Congo”, 1974. Cet ouvrage est en consultation libre dans notre galerie.
M. Alain Lecomte, galeriste parisien et auteur, lui aussi, de plusieurs ouvrages de référence livrait dans le Tribal Art magazine en 2011 un témoignage quant à sa relation avec M. Lehuard. Cliquez ici pour lire l’article et en savoir davantage à son sujet.